Yuka Nagate
(scénario & dessin)

Butterfly Beast

tome 1

Manga, histoire / XVIIe siècle 
Publié en VF le 01 Septembre 2021 chez Mangetsu
Publié en VO en 2010 par Leed dans Comic Ran (« Choujuu Gitan / 蝶獣戯譚 »)

1635, début de l’ère Edo. Le Japon savoure une paix fragile, après une longue période de guerres féodales, mais dans l’ombre des guerriers laissés pour compte sévissent encore. Dans le quartier des plaisirs de la capitale, Ochô est une kunoichi, courtisane de haut rang le jour, assassin la nuit. Sa mission : traquer sans relâche ses anciens frères d’armes dévoyés.

Nous sommes en 1635 au début de l’ère Edo. Yoshiwara est le quartier des plaisirs de la nouvelle capitale mais c’est d’abord et surtout un ghetto qui permet de surveiller tout le monde et d’arrêter tout le monde puisque tout le monde s’y rend à un moment ou à un autre.

Jin’emon Shôji a la double-casquette proxénète / maître-espion, et Ochô a la double casquette courtisane / espionne. Et comme le premier traite comme une merde la seconde bien qu’elle soit son principal gagne-pain et son principal agent, c’est très difficile de savoir quelles sont les missions des uns et des autres qui mélangent les genres de manière très étrange… Ce fameux patron, il espionne la capitale pour le Shogun ou il veut juste faire du fric avec de la chair fraîche ?

L’idée de la série est d’opposer « ninjas loyaux » et « ninjas dévoyés , et donc d’opposer prédateurs et proies. Déjà perso je ne voie aucune différence morale entre ceux qui menacent et assassinent aux ordres du gouvernement, et ceux qui menacent et assassinent pour d’autres acteurs du « Grand Jeu ». Ensuite on veut transposer au monde des ninjas la dichotomie entre samouraïs et rônins, sauf que cela ne marche pas…

– Je reconnais que tu étais un guerrier doué, mais maintenant, tu n’es qu’un vulgaire criminel. Un shinobi qui a perdu son âme n’est plus un shinobi !

La fin des guerres civiles a envoyé des milliers et des milliers de guerriers au chômage donc à la misère, par la mort de leur seigneur ou par les réductions d’effectifs effectués par leurs seigneurs Par contre la fin de la guerre civile n’a fait que renforcer les guerres de l’ombre faites de complots et d’intrigues : le shogun surveille ses vassaux, les vassaux surveillent le shogun, les vassaux s’espionnent entre eux, et je ne parle même parle des Clans Môri, Chôkosabe, et Shimazu qui accueillent tous les opposants au régime. Contrairement au propos crépusculaire du manga, l’Ère Edo est l’Âge d’Or des ninjas !!!

Comme avec tous les mangaka qui se cherchent, nous avons une suite de récit courts (enfin, pas si courts que cela)…
– dans un premier temps, Ochô doit faire face à une ancien élève et amant passé du « Côté Obscur »
– dans un deuxième temps, Ochô doit stopper un ninja dévoyé qui voudrait réaliser un coup d’État avec un dizaine de péquins, mais avant cela elle doit démasquer l’espion qu’on lui a envoyé pour la tromper

Le ton du manga est très tragique mais d’abord et surtout très froid. Avec cette antihéroïne chasseuse de ninjas qui garde l’illusion du libre arbitre alors qu’elle n’est qu’un instrument au service de ses supérieurs, on lorgne peu ou prou sur le légendaire Lady Snowblood (surtout avec cette fin avec du sang sur la neige). Mais Lady Snowblood était une œuvre hors normes, le dessinateur Kazuo Kamimura ayant jeté l’éponge effrayé par le talent de scénariste de Kazuo Koike (c’est dire la puissance du truc)…
Par contre les graphismes réalistes très fins de Yuka Nagate sont impeccables. On n’en attendait pas moins de la dessinatrice de La Légende de Toki. Ce n’est pas aussi épatant et aussi magistral qu’un Takeshi Inoue, mais le résultat est vraiment très beau !

En bref c’est plein de bonnes intentions dans la conception et dans l’exécution, mais cela manque cruellement de vista pour jouer dans la cour des grands (bien qu’ici force est de constater que les grands sont quasiment des monstres sacrés de la Planète Manga)…

note : 6,5/10

Alfaric

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