Jean-Luc Istin (scénario)
Kyko Duarte (dessin)

Elfes tome 1 :

Le Crystal des Elfes Bleus

Bande dessinée, fantasy / heroic fantasy
Publiée le 01 mars 2013 chez Soleil

Les Elfes bleus d’Ennlya, une petite ville portuaire du Nordrenn, ont tous été massacrés ! L’Elfe bleue Lanawyn et Turin, un homme réputé, enquêtent alors que toutes les pistes mènent vers un clan d’Yrlanais, ces Hommes du nord qui haïssent les Elfes. Dans la cité île Elsemur, Vaalan une jeune Elfe bleue passe l’épreuve de l’eau des sens. La mère prophétesse voit son avenir proche, un avenir lié au crystal sacré. « Celui qui contrôle le crystal, contrôle l’océan. » Cette annonce fait grand bruit et il se murmure que Vaalann pourrait être le messie que les Elfes bleus attendent depuis plusieurs générations… Entre enquête et initiation, cette histoire nous mène dans un monde de faux-semblants, de rêves et de désillusions !

A l’heure où j’écris ces lignes l’univers des Terres d’Arran compte bien plus de 50 tomes (mdr les prescripteurs d’opinion qui avaient prédit que la série n’arriverait même pas au bout de sa première saison) , donc je peux me permettre d’avoir un regard rétrospectif avec cette relecture et cette re-critique du tome inaugural de la saga intitulé Le Crystal des Elfes Bleus… Nous suivons d’un côté l’elfe bleue Lanawyn et l’humain Turin (Luthien et Beren ? Les lecteurs de J.R.R. Tolkien savent !) enquêter sur le massacre des habitants elfiques d’Ennlya, et d’un autre côté nous suivons l’arrogante Vaalann et le modeste Lyann en quête du mythique Crystal Bleu des Elfes Bleus. Évidemment rivalité entre Elfes est Humains, évidemment complots et intrigues, et évidemment les deux POVs se rejoignent à la fin mais pas de la manière attendue…

C’est un tome d’introduction relativement efficace, mais il y a vraiment à redire sur les choix effectués. Déjà la structure en POVs ça marche très souvent en roman et assez souvent au ciné et à la télé, mais ça marche nettement moins bien en BD à cause des transitions (au plutôt de l’absence de transition) qui donnent un rythme saccadé voire carrément haché au récit (ici renforcé par les ellipses qui sont autant de hiatus)… Ensuite les pages consacrées au récit sont augmentées de nécessaires pages consacrées au worldbuilding (centré sur Ulronn / Ultron personnage 50% Fëanor 50% Sauron, les lecteurs de J.R.R. Tolkein savent !), mais le « whodunit » se transforme en « twist » en un seul album du coup c’est d’autant plus atténué que Jean-Luc Istin spoile tout au presque à mi-récit (et pour ne rien gâcher cette histoire de cristaux magiques censément clin d’œil aux Silmarils de J.R.R. Tolkien ne va jamais fonctionner en plus d’être morte dès le départ au vu de la structure de la série).

– Je n’aurais jamais cru mourir au combat à côté d’un elfe !
– Et que pensez-vous de mourir aux côtés d’un ami ?
– Ah oui, ça je peux le faire…

Malheureusement il y a encore des choses à redire : en caricature de beauf facho le roi humain Rinn est peu crédible (et Lanawyn est suffisamment conne pour donner de l’eau à son moulin), le roi elfe Aamnon censément inspiré d’Elrond change son fusil d’épaule de façon WTF (en passant du pacifisme responsable au bellicisme irresponsable), l’humain Gal, le mage elfe Nelyr et le nécromancien orc Nerron importants pour le récit sont traités par-dessus la jambe, et l’attaque surprise d’Elsémur met la suspension d’incrédulité à rude épreuve (on nous montre bien qu’un seul bateau peut bloquer l’accès à la ville, mais les Yrlanais parviennent à prendre possession du port sans coup férir et sans que personne ne s’en aperçoive donc les Melnibonéens se retournent dans leurs tombes)…

Grosso modo on veut dire trop de choses en trop peu de pages ce qui nuit à l’efficacité de l’ensemble ! Et c’est le gros défaut de Jean-Luc Istin qui est trop ambitieux pour son propre bien car il n’a pas le talent et la vista nécessaires pour aller au bout de ses intentions. Donc c’est trop souvent inutilement compliqué, et ici il veut nous refaire le coup du boss de fin qui a un pied dans chaque camp et qui manipule les uns et les autres pour parvenir à ses fins grâce à un master plan mûri de longue date. Déjà qu’on a du mal à suivre et à comprendre la stratégie de Palpatine dans la prélogie Star Wars, imaginez qu’on refasse la même chose dans une BD de 50 pages (avec en plus une prophétie et un élu, les plus gros clichés qu’ait connu et subi la Fantasy) !

Visuellement le dessinateur Kyko Duarte assisté de Diogo Saito aux couleurs réalise des graphismes fantasy intéressants (avec quelques paysages en doubles planches de toute beaut, mais aussi d’emprunts visibles aux films fantasy de Peter Jackson). Le travail informatique c’est bien, mais quand il se voit trop on comprend immédiatement que « nouveauté » n’est nullement synonyme de « qualité » : on ne peut que constater qu’il manque comme une étape dans le processus numérique avec tous ces détours en blanc ou en noir qui auraient dû être masqués. Après pour pinailler, il y a quand même des différences entre le Turin de la première planche et le Turin de la dernière planche…

PS: entre Jean-Luc Istin qui faire toujours dire des commentaires en dessous de la ceinture sur Lanawyn et Kyko Duarte qui se fait un plaisir avec le courbes le plus souvent dénudées de Vaalann, on se demande lequel des deux est le plus porté sur la chose…

note : 6/10

Alfaric

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