Takashi Nagasaki (scénario)
Kôji Kôno (dessin)

Inspecteur Kurokôchi, tome 23

Manga, policier
Publié en VF le 01 avril 2021 chez Komikku
Publié en VO de février 2012 à juin 2018 par Nihon Bungeisha dans le Weekly Manga Goraku (« クロコーチ, Kurokōchi »)

Nommé à la tête du parti libéral-nationaliste, Sawatari s’est maintenant assuré la place de Premier ministre. Afin d’éliminer les derniers obstacles à la réalisation de ses plans, il convoque tous ses ennemis personnels pour une ultime confrontation ! Kurokôchi, Seike, Aonuma, Ushii, Kurita, Asaki, Isshiki, Shirasu… devant ces huit témoins, le monstre se lance dans un grand déballage des meurtres les plus sordides de sa longue carrière… Bien et mal, noir et blanc, tout se mêle et s’entremêle dans cette fresque qui trouve ici une conclusion aussi décoiffante qu’inattendue !!

L’affiche du film Magnum Force, deuxième opus de la saga Dirty Harry, était accompagnée de la phrase suivante : « A man’s got to know his limitation. »

Tout chose a fin, et ce chouette manga policier y parvient avec ce tome 23. Après avoir si longtemps combattu ensemble les forces obscures de la crevardise, les Batman et Robin de la police japonaise sont confrontés à leurs limites : quand la criminalité en col blanc se met au-dessus des lois et que le pire des monstres obtient les pleins pouvoirs, la justice devient un mal sous une autre forme ! D’un côté on a le politicien serial killer qui vient se pavaner devant ceux qui ont failli le faire coffrer malgré son impunité légalement organisée. Et d’un autre côté nous ont notre ripou justicier complètement dévasté par la mort de de son témoin Mami Momosaka et de sa famille, massacrées l’une et l’autre par l’un des nombreux sicaires à la solde de son ennemi juré…

L’inspecteur Kurokôchi ne sait plus à quel saint se vouer, mais quoi qu’il puisse lui ne coûter il est hors de question que le mal puisse triompher !

Des fois on ne peut battre le mal que par le mal !

Dans ce tome final le climax survient finalement très rapidement.
ATTENTION SPOILERS Les élites autoproclamées sont soulagées qu’on ait éliminé le monstre qu’elles ont largement contribué à créer, mais il leur faut à tout prix un bouc émissaire à exécuter avant qu’on ne puisse les accuser. C’est ainsi que le nouveau chef des enquêtes interne se retrouve à la préfecture de police avec un cadavre, un suspect envolé dans la nature et sept témoins qui n’ont rien vu et qui n’ont rien entendu. Ils les passent à la question les uns après les autres, et au final tout repose sur les épaules de Seike qui passe en dernier et qui voit ses convictions mises à rude épreuve. ?? Les autorités pourraient envoyer tout le monde au tribunal pour faux témoignages et obstruction envers la justice, mais cela serait pour se retrouver avec comme victime un politicien critiquer comme traître à la nation et comme meurtrier un policier acclamé comme héros de la nation. Plus le mensonge est gros et plus il passe, donc les élites autoproclamées sont obligées d’inventer un gros bobard pour sauver leurs peaux ! FIN SPOILERS

 

« J’aimerais que le monde n’ait qu’une seul tête pour la lui couper » disait le Marquis de Sade à l’époque de la Révolution Française. Et finalement c’est ce qu’aura fait le ripou justicier : remonter les réseaux, faire tomber des têtes, et obliger les pourris restant à sortir du bois et à mettre tous leurs œufs dans le même panier… Au final il récole un « pognon de dingue » issu de tout l’argent sale du Japon bien-pensant pour le transmettre à un homme propre. Batman doit passer la main à Robin, et c’est tout naturellement que le chevalier noir qui a passé tout sa vie à combattre le mal par le mal cède la place au chevalier blanc qui a du pain sur la blanche pour incarner un nouvel espoir !

Malgré mon clone japonais, je ne suis pas assez au courant des actualités nippones pour identifier les très nombreux sosies, parodies et caricatures de figures politiques et médiatiques du Pays du Soleil Levant. Dans ce manga je suis donc passé à côté de beaucoup de choses et c’est bien dommage. Alors certains auront beau jeu de critiquer le côté grand-guignols des situations, des rebondissements et des retournements de situations qui font la part belle aux légendes urbaines et aux théories du complot. Mais derrière l’humour noir parfois presque cartoonesque, il y a une critique très sérieuse du monde contemporain en général et du Japon contemporain en particulier. Qu’on se le dise le scénariste Takahashi Nagasaki est excellent, car dans les toutes dernières pages il nous offre un ultime twist énormissime !

Du blanc du noir, du noir au blanc : ATTENTION SPOILERS
Planqué quelque part en Mer de Chine après avoir fait le tour du monde des paradis fiscaux, véritables délinquants internationaux, le ripou justicier désormais en retraite affirme avoir fait tout ce qu’il a fait pour le pognon et que s’il a réussi c’est juste parce qu’il avait le cul bordé de nouilles. Et alors que tout le monde recherche de qui le monstre Sawatori était la taupe du mal, nous découvrons qu’en fait le ripou justicier était une taupe du bien qui a fait tout ce qu’il a fait pour la défense de la justice et que s’il a réussi c’est parce qu’il a tout sacrifié pour y arriver.
Pour que le mal triomphe il suffit que les gens de bien ne fasse rien, et c’est pourquoi « Shiro » le blanc a mis ses couilles en bandoulières pour endosser le rôle et l’identité de « Kuro » le noir, choisissant de combattre le mal par le mal car pour lui rien ne justifie que les victimes soient condamnées à l’oubli pour ne pas déranger les petites affaires de la ploutocratie. Je n’ai vu un truc aussi énorme que dans Le Nouvel Angyo Onshi, où un fantôme du passé partait en croisade pour offrir aux générations futures une chance de s’émanciper des forces obscures de la crevardise.

note : 8,5/10

Alfaric

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