Akiko Higashimura
(scénario & dessin)

Le Tigre des neiges, tome 1

Manga, histoire / XVIème siècle
Publié en VF le 08 novembre 2018 chez Le Lézard Noir
Publié en VO à partir de 2015 chez Shogakukan (« Yukibana no Tora »)

Et si Kenshin Uesugi, puissant seigneur de guerre ayant vécu durant l’époque Sengoku, au XVIe siècle, était en réalité une femme ? La mangaka Akiko Higashimura part de cette théorie existante pour nous proposer un manga historique relatant la vie de ce stratège hors pair surnommé le « Tigre d’Echigo ». L’histoire commence en 1529, à la naissance du troisième enfant de Tamekage Nagao, seigneur du château de Kasugayama. Son fils ainé n’ayant pas l’étoffe d’un guerrier, Tamekage veut faire de ce dernier-né son héritier, mais à son grand désespoir, c’est une fille qui naît. Il décide alors de l’élever comme un garçon et le nomme « Torachiyo ». Véritable garçon manqué, Torachiyo va grandir dans un petit château des montagnes, sans savoir quel incroyable destin l’attend…

Dans les années 1970 c’est en plein women’s lib que Riyoko Ikeda révolutionnait l’univers des shojo avec une série consacrée à la Révolution… Aujourd’hui c’est grâce aux nouvelles éditions du Lézard Noir que je découvre en la personne d’Akiko Higashinura l’une de ses héritières qui avec Le Tigre des neiges transpose à l’ère du Sengoku Jidai tous les thèmes de la série culte Lady Oscar… Et après tout pourquoi pas ? Avant d’être une époque de guerre civile, ce fut une époque de révolution où le Japon d’en bas a tout fait pour remettre l’injustice sociale instaurée et perpétrée par le Japon d’en haut (refrain trop bien connu) avant que Tokugawa Ieyasu ne fige le pays pour 250 ans d’immobilisme aristocratique avec sa restauration conservatrice (connard va). L’idée de base de cette série, qui est loin d’être farfelue, c’est que Uesugi Kenshin l’un des héros légendaire de cette époque aurait été une femme et que la contre-révolution conservatrice ait réécrit son histoire pour en faire un homme correspondant à tous les codes machistes et virilistes du bushido. Le doute est plus que permis car chacun le sait, l’Histoire est écrite par les vainqueurs… Toute commence avec le dirigeant contesté de la province d’Echido souhaitant un guerrier pour lui succéder, mais comme son fils aîné qui aurait préféré naître fille consacre son temps à la musique et à la poésie il reporte tous ses espoirs sur son troisième enfant… Damned celui-ci est une fille ! Mais qu’importe il l’élèvera en garçon pour en faire un nouveau dieu de la guerre !!!

– Tu penses que le bébé sera un garçon ou une fille ? Tout le monde au château est persuadé que se sera un garçon… Mais toi, qu’en penses-tu ?
– Euh moi, je voudrais une petite soeur !!
– Houla houla ! Si tu dis cela, père va de gronder.
– Si j’ai une petite soeur, je planterai plein de fleurs au château ! Je cultiverai un champ de fleurs avec ma petite soeur !
– Un champs de fleurs… Je vois, après tout pourquoi pas ? Si c’est une fille, elle s’occupera des fleurs avec toi. Elle apprendra à jouer du koto. Cela vaut mieux pour elle… Si c’est un garçon, il passera sa vie à faire la guerre, le pauvre… Ah là là… Moi aussi, j’aurais voulu être une fille. C’est fatiguant d’être un homme…

Ce tome 1 est un tome d’introduction certes, mais c’est d’abord et surtout un récit d’apprentissage qui entre histoire, politique et liens familiaux s’interroge sur les sexes, les genres et la manière dont on plaque des idées préconçues à leur sujet sur l’ensemble des activités humaines. La mangaka traite ces thématiques de manière pudique mais avec autant de réflexion que d’émotion : si c’est emprunt de bons sentiments, elle aborde son sujet de manière très pédagogique en n’hésitant pas à s’adresser moult fois directement aux lecteurs et aux lectrices (parfois avec beaucoup d’humour, dans une parodie de carnet de bord voire de journal intime 2.0). Graphiquement j’ai été plus sensible aux décors qu’aux personnages, sans doute en raison de partis pris girly (les bishojo, les bishonen et tutti quanti), mais les planches sont fort agréable à regarder car elles respirent la bonne humeur et la bonne volonté… Bref, l’Histoire est en marche, et la confrontation entre le garçon manqué du Clan Uesugi et l’androgyne efféminé du Clan Takeda est inévitable (avant l’arrivée d’Oda Nobunaga le conquérant bisexuel qui préférait les hommes aux femmes) ! To Be Continued !!!

PS : un remake de Lady Oscar reprenant les thématiques LGBT, ça serait vachement intéressant !

note : 7/10

Alfaric

Parce que notre avis n’est pas le seul qui vaille, quelle note mettriez-vous à cet ouvrage ?

[ratingwidget post_id=9777]

Pin It on Pinterest

Share This