Kia Asamiya

Batman : L’Enfant des rêves, tome 2

Comic, policier / superhéros
Publié en VF le 12 juillet 2002 chez Semic
Publié en 2001 chez DC Comics (« Batman: Child of Dreams »)

Tokyo. Aujourd’hui. « Nous attendons d’un instant à l’autre l’arrivée de Bruce Wayne, qui atterrit au Japon dans son jet privé et s’est installé au Waldorf de Tokyo, d’où il organisera tous ses rendez-vous. Le milliardaire de Gotham City vient de faire une généreuse donation au « Coup de Cœur Global », un centre de recherche administré par le complexe pharmaceutique Tomioka… » Après les dramatiques événements qui ont vu Gotham City envahi par un escadron d’ersatz de super-vilains sous l’emprise de drogues puissantes, Batman décide de remonter à la source. Il se rend à Tokyo afin de de rencontrer Kenji Tomioka, président de Tomioka Pharmaceutics… L’oncle et le sponsor de la belle journaliste Yuko Yagi. Toutes les preuves montrent que l’affaire mène jusqu’au Japon. Et si aujourd’hui les crimes s’arrêtent, cela voudra dire que le tueur est effectivement japonais.

On ne présente plus le personnage iconique de Batman, le héros vigilante surnommé le Chevalier Noir de Gotham qui a marqué le XXe siècle de son empreinte au point d’être associé au phénomène de l’urbanité. Car derrière le masque plus qu’un homme il y a des idées, et les idées sont dotées de l’immortalité !
Les univers mangas et comics font parfois de belles voire fructueuses collaborations, et tel est le cas ici où Kia Asamiya réaliser un récit en 2 parties intitulé L’Enfant des rêves : la 1ère se déroule à Gotham, la 2e à Tokyo !

Je vais commence par parler de la forme : pour un habitué du manga comme moi le format comic est très agréable à lire. Après le mangaka a un style très typé années 1990 qui a un peu vieilli (il n’a pas fait grand-chose avant les années 1990 et n’a plus fait grand-chose après les années 1990), avec des planches entièrement tramées et un charadesign qui par moment n’est pas sans rappeler celui d’Hiromu Arakawa (les personnages sont très expressifs mais pas toujours réalistes avec leurs longs nez typiques du mangaka). Par contre on sent bien que l’auteur possède la double casquette dessinateur / animateur : le découpage est très fluide, les scènes d’action sont très dynamiques tout en restant claires et lisibles, et cerise sur la gâteau toutes les doubles planches pètent la grande classe !

– Le monde n’a pas besoin de deux batmen !

Dans la 2e partie Bruce Wayne le super-milliardaire se rend à Toyko, car Batman le super-détective doit remonter la filière de l’Otaku pour mettre fin à son trafic. Et c’est tout naturellement que toutes les pistes mènent à Tomioka Pharmaceutics quand Yuko victime à son insu se transforme en Catwoman… Et c’est très gênant que les dialogues soient encore plus inégaux que dans la 1ère partie…
ATTENTION SPOILERS On a un antagoniste victime du système, un scientifique aussi génial qu’altruiste dont les découvertes pour l’humanité ont été enterrées au nom de la sinistre Loi du Marché, qui a basculé dans la radicalisation avec un conception toute personnelle de la morale : il veut offrir un Batman à chaque métropole du monde pour mettre fin au règne de l’injustice ! L’idée est très intéressante : l’exceptionnalité de l’héroïsme est-elle compatible avec la production en série et la société de consommation ? Sauf que dans le final tout est invalidé et on se retrouve avec un otaku fou caricature de la génération « moi, moi, moi » qui veut réaliser son rêve d’enfance à tout prix, quitte à détruire celui des autres. Il veut être comme Batman, mais cela ne lui suffit pas car ce collectionneur sociopathe veut être le vrai Batman, le seul et l’unique, quitte à tuer l’original pour cela. Je hais ces scenarii japonais dans lesquels le méchant est totalement incohérent dans ses motivations et ses ambitions ! FIN SPOILERS
Il est dur de réaliser ses rêves d’enfants, justement car l’enfant dans sa période égotique vit dans sa bulle, dans son propre univers qui prend peu ou pas le reste du monde en compte (et parfois de moins en moins).
Grandir c’est accepter les autres et sa place dans la société, encore faut-il que celle-ci en accorde une ce qui n’est pas gagné dans le monde cauchemardesque de la compétitivité à outrance qui nous explique que c’est normal que 99% des gens échouent pour qu’1% d’entre eux réussissent, et qu’il ne faut pas hésiter à abandonner voire sacrifier tout ou partie de la population pour que le système puisse continuer de se regarder béatement le nombril en psalmodiant que tout va bien…

 

Batman est trop occupé à botter les fesses des super-vilains pour s’attaquer aux racines du mal : l’injustice, l’inégalité, la précarité, la pauvreté… Car quand tu as ta place dans la société, que tu gagnes correctement ta vie et que tu manges à ta faim avec l’espoir que demain sera meilleur qu’aujourd’hui, la criminalité atteint d’elle-même son étiage. En fait toutes les statistiques montrent que le lien est mathématiques entre violence sociales et inégalités sociales, et il n’y a que les élites autoproclamées qui l’ignorent encore. Batman protège veuves et orphelins, faibles et déshérités, il serait donc temps que Bruce Wayne le fasse aussi car en tant que super-milliardaire il a  les moyens de lutter contre le naufrage du néolibéralisme.

note : 7/10

Alfaric

Parce que notre avis n’est pas le seul qui vaille, quelle note mettriez-vous à cet ouvrage ?

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