Christophe Bec (scénario)
Stefano Raffaele (dessin)

Deepwater Prison

tome 2 : Le Bloc

Bande dessinée, thriller / anticipation
Publiée le 24 septembre 2014 chez Soleil

La prison haute sécurité du futur ? au fond des abysses ! Nul ne s’échappe de la Deepwater Prison. C’est ce que semblent ignorer les dangereux criminels qui y sont incarcérés et qui fomentent un audacieux plan d’évasion. Leur ticket pour la surface et la liberté ? Une représentante du gouvernement, piégée elle aussi dans la station engloutie. Mais attention : les eaux sombres environnantes abritent des créatures inconnues et terrifiantes.

Je ne suis pas coutumier du fait, mais pour une fois je fais faire un tir groupé pour la série toute entière…

La série Deepwater Prison suit de prime abord les mésaventures IRL de la station pétrolière « Deepwater Horizon ». Sans surprise nous découvrons donc une firme multinationale pété de thunes prête à tout et au reste pour faire un peu plus de pognon que d’habitude (pognon dont elle ne saura pas quoi faire à part jouer à qui a la plus grosse avec les autres firmes multinationales de mes couilles), et qui roule des mécaniques en réalisant un forage record conduisant tout logiquement à une marée noire record.
Car bien évidemment on se torche le cul du principe de précaution puisqu’on n’en a rien a faire des lois divines et humaines et puisqu’on envoie chier les normes sociales et environnementales, et c’est donc tout naturellement qu’on aboutit en fiction comme IRL à une catastrophe hors norme saccageant le Golfe du Mexique… (IRL 9 ans après les faits le procès de British Petroleum est toujours en cours : une fois de plus la justice prouve qu’elle est de classe en étant lente ou rapide en fonction des situations, puisqu’elle est très lente quand le prévenu est riche et très rapide il est pauvre, et vice et versa bien évidemment)

Il n’y a rien d’autre ici que le désespoir, le néant, les méandres… Ce qui remplace tout, c’est le temps. C’est seulement ça la prison : du temps infligé dans sa nudité crue. Alors on marche dans un sens, puis dans l’autre ? errant comme des zombies dans ce repaire de vices où le moindre geste peut tourner au drame. Pas d’intimité, pas de vie privée… La pudeur s’y éparpille en lambeaux de chair. On n’est plus de que des numéros de matricule aux mains d’une administration toute-puissante et ses matons-soldats bien dociles.

Alors on a d’un côté l’envoyée gouvernementale Elaine Rosenberg, belle-gosse strong independant woman, qui est chargée d’enquêter sur la catastrophe pour établir les responsabilités des uns et des autres, et qui va devoir faire face aux obstructions d’une firme multinationale qui va tout faire pour l’empêcher de découvrir le pot aux roses (quitte à multiplier les plans foireux pour l’éliminer). Et d’un autre côté nous avons un remake de Prison Break ayant lieu dans l’équivalent de l’Aquatraz de la série Dark SF Judge Dredd, et nous suivons les efforts d’un groupe pour s’échapper de l’enfer : le lieutenant Stewart trahi par sa hiérarchie pour couvrir les crimes de guerres de nababs hauts placés, le mafieux malchanceux Richter, le golgoth dénommé Terminator, des dénommés Karim Ghelloussi et Ted Cofey, et le psychopathe matricide Johnny-Belle-Gueule… (rien que dans le dramatis personae ça coince, puisque dans la caractérisation on ne sait rien de rien de 2 des membres de la Team Grande Évasion) Christophe Bec rajoute une histoire de machélodon et de créatures sous-marines préhistoriques comme dans sa série Carthago, et une histoire d’écowarrior sur le retour hésitant entre les deux côtés de la Force…

Mais au final, le côté enquête anticapitaliste est téléphoné, le côté thriller carcéral est escamoté, le côté écowarrior on aurait pu s’en passer, et le côté cryptozoologie n’amène rien niveau action et tension (et pourtant l’auteur est meilleur sur les séries courtes que sur les séries longues dans lesquelles il s’éparpille encore plus)… Je suis bien conscient d’être sévère, mais la mayonnaise ne prend pas vraiment car ce qui aurait dû être le centre de la BD finalement ne sert que de toile de fond, et les mind games géniaux de la série de Paul Scheuring sont remplacés par les viols à répétition de Johnny-Belle-Gueule (l’auteur manifestation influé par les dégueulasseries de Blast en rajoutant plusieurs couches dans le sordide en cours de route, surtout dans le troisième et dernier tome d’ailleurs), en plus de ramener tout le monde à la case départ… C’est d’autant plus dommage que Christophe Bec est un excellente dialoguiste et que les phylactères qu’il a mitonné sont de qualité en plus d’être de véritables mines à citations !

 

Les couvertures du talentueux Eric Henninot sont très réussies, mais les dessins réalistes voire photoréalistes de Stefano Raffaele ne sont pas en reste et force est de constater que l’ensemble n’est pas mal non plus (même si de temps à autres j’ai confondu certains personnages secondaires se ressemblant). Après si c’est assez drôle que le traître de service ait la tronche de l’acteur Kevin Bacon habitué aux rôles de traîtres au cinéma, il faudra m’expliquer pourquoi l’exécuteur des basses œuvres de l’hypercapitalisme a la tronche d’Eric Besson ?

note : 6,5/10

Alfaric

Parce que notre avis n’est pas le seul qui vaille, quelle note mettriez-vous à cet ouvrage ?

 
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