Jean-Pierre Pécau (scénario)
Leo Pilipovic (dessin)

Le Grand Jeu tome 1

Ultima Thulé

Bande dessinée, uchronie / fantastique
Publiée 26 septembre 2007 chez Delcourt

1945. La seconde guerre mondiale est terminée depuis 4 ans. Elle a aboutit à la victoire des Alliés et à la paix séparée avec l’Allemagne nazie. Tandis que l’heure est à la méfiance vis-à-vis de l’Union Soviétique, le Charles de Gaulle, fleuron de la flotte dirigeable d’Air France, a disparu quelques part au nord du Groenland. Le reporter Nestor Serge, de France Soir, est chargé d’accompagner l’expédition de secours…

Jean-Pierre Pécau n’en finit décidément plus avec les uchronies (dommage que comme Christophe Arleston cela fasse bien longtemps que l’intérêt commercial passe avant l’ambition artistique) ! Dans celle qu’il développe dans Le Grand Jeu, on a écouté Charles de Gaulle au lieu de Philippe Pétain et on était donc bien « en ordre de bataille » face aux Allemands lors de la WWII. D’ailleurs cette WWII n’a pas duré longtemps puisqu’au lieu de lécher le cul des Nazis, la France et l’Angleterre se sont alliées à l’URSS du coup ils ont été pris à revers dès « la Drôle de Guerre ». Mais plus les changent et plus elle restent les mêmes : Hitler et le NSDAP prétendument disparus, les Occidentaux se sont empressés de signé l’armistice et de laisser les régimes totalitaire s’expliquer entre eux (parce qu’un fasciste qui respecte le droit de propriété de la ploutocratie vaudra toujours mieux qu’un communiste qui se torche le cul de l’un comme de l’autre)…
Du coup l’Angleterre et la France sont restées des grandes puissances, l’Oncle Sam n’a pas racketté l’Europe une 2e fois pour prendre sa place, la guerre continue sur le Front Est, et comme Staline est trop occupé à vaincre la Bête Immonde armée par le Grand Capitale, en Orient Tchang Kaï-chek a vaincu Mao et le Japon Impérial se fait tout petit. Politiquement la décolonisation n’est pas à l’ordre du jour, les services d’ordre de Doriot et de Thorez se livrent de véritables guerres de rues et Charles de Gaulle attend son 18 Brumaire…

Mais Jean-Pierre Pécau est aussi un amoureux des genres de l’imaginaire, et il mélange tellement bien fiction et réalité qu’on finit pas s’y perdre d’autant plus rapidement queles personnages s’y mettent aussi (genre l’ancien catcheur Angelo Ventura qui sort des répliques de Michel Audiard). D’une autre manière que Serge Lehmann il rend donc hommage à toute la pulp-culture : super-slips américaine, loup-garous tibétains, sorciers lovecraftiens, ruines cyclopéennes et Grandes Anciens croisent à la fois des détournement de personnages réels et des caricatures de personnages jamesbondiens (avec pour fil rouge cette fameuse terre-creuse). Nestor Serge ancien des brigades internationales, transfuge de L’Humanité qui est passé à France Soir, est le héros journaliste typique des récits de cette époque (Tintin, Lefranc, Clark Kent, Peter Parter), mais on le trimballe d’un lieu à un autre pour que l’auteur puisse le voir sévir là où il le veut. Ce dernier a toujours été bon dialoguiste donc il sert de passe-plats à un déluge de références et de punchlines.

Par contre ça va trop vite (parce que c’est pulpien, mais pas que). A partir du tome 3 on passe de 48 à 56 pages et on voit de suite la différence avec un meilleur travail sur le rythme, l’ambiance, le développe de l’histoire et des personnages… Mais chassez le naturel il revient au galop : on gratte des pages pour faire durer la série quand elle vend bien, puis on expédie voire on bazarde tout quand elle vend moins bien. Les dessins de Léo Pilipovic sont satisfaisant mais inégaux dans le sens où certains éléments sont mieux dessinés que d’autre (comme les engins dieselpunks). Cela manque de détails, de précision dans les décors (ah les onomatopées en grosses tailles de caractères), d’ambition donc de dynamisme et de fluidité dans le découpage aussi, mais parfois c’est réussi donc je me demande si la colorisation de Thorn ne joue pas aussi (tout comme l’encrage). Dans tous les cas je l’ai déjà trouvé en meilleur forme qu’ici…

– Berlin est effectivement sur la ligne de front, mais vous êtes-vous demandé pourquoi les fascistes n’ont pas été mis en déroute ?
– grâce à l’aide massive des alliés qui préféraient toujours un petit nazi sous contrôle à un gros stalinien à leurs portes…

Dans ce tome 1 intitulé Ultima Thulé et paru en 2007, le Titanic volant appelé « Le Charles de Gaulle » est victime d’un crash au Pôle Nord. Nestor Serge ancien des brigades internationales des années 1930, ancien pilote de chasse de la WWII (Monsieur Bob Morane, levez la main s’il vous plaît), et ancien reporter de guerre est sommé par la direction de France Soir de se rendre sur place avec la bénédiction du Colonel Mory. A Paris il est sauvé d’un super-slip fasciste par les services secrets français, et à Hambourg il est sauvé de loups-garous nazis par les services secret soviétiques, avant d’être pris en main en Island par les services secrets anglais… Cela va vite, trop vite, mais on s’amuse bien : j’adore la lutte des classes, surtout prise au second degré, et mention spéciale à Jacques Bergier du Deuxième Bureau qui est carrément un personnage de X-Files transposé dans un univers à la OSS 117 ! To Be Continued !!!

note : 6/10

Alfaric

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