Buichi Terasawa
(scénario & dessin)

Gun Dragon Sigma

Manga, science-fiction / polar
Publié en VF le 07 décembre 2017 chez Isan Manga
Publié en VO en 1998 dans Super Jump (« Shinsengumi GUNDRAGON série :  GUNDRAGON Σ »)

2030, les frontières de l’espaces sont officiellement ouvertes. Les visiteurs issus des différentes planètes du système sont autorisées à venir sur Terre. Le gouvernement décide de limiter les échanges sur une île artificielle créée au large d’Okinawa : l’île de Dejima. La rencontre des différentes espèces, issues de mondes tous plus différents les uns que les autres, créé des tensions sur l’île. Une force spéciale, composée d’humains comme d’extra-terrestres est créée afin de maintenir l’ordre à Dejima : les Gun Dragon. Pendant une patrouille, l’officier S (Sigma) arrête un camion transportant des marchandises illégales. A l’intérieur se trouve un Mumère, espèce venant d’une planète marine, qui met fin à ses jours afin de protéger un lourd secret. C’est le début d’une longue enquête pour l’officier S.

L’humanité a atteint les étoiles… ou plutôt les étoiles ont atteint l’humanité ! L’Alliance des Terriens et l’Union des vies extraterrestres ont trouvé un terrain d’entente et la police mixte de Gun Dragon assure la sécurité de Dejima situé dans l’archipel des Ryûkyû quelque part entre Taïwan et le Japon, un véritable comptoir commercial intersidéral de 10000 âmes qui s’est développé autour du seul astroport autorisé de la Terre (à l’image du comptoir de Nagasaki, seul port étranger autorisé durant le Japon durant l’Époque Edo).

Dans Gun Dragon Sigma, nous suivons dans ce tome les enquêtes, les heurs et les malheurs de l’Agent Sigma, flic de choc et de charme des Guns Dragons de Dejima : clandestins non-humains, trafiquants d’être humains travaillant à assouvir d’étranges faims, immortels blasés dealer de trous noirs… Nous sommes donc dans un action movie comme les années 1980 et 1990 savaient si bien les faire et qui ici tient autant du space opera vintage que du polar cyberpunk à la Blade Runner !

– Je t’en prie ! Vous n’avez pas de pitié chez les Gun Dragon ?!
– Pas de chance… La pitié est justement en rupture de stock.

Quand on feuillette l’album on peut trouver cela moche, et à juste titre car pionnier du DAO le mangaka s’est lancé ici à la fin des années 1990 dans une œuvre hybride où tout été modelé en 3D sur ordinateur à part l’héroïne incarnée par la top modèle Yinling dont les photographies ont été insérées/incrustées dans les environnements digitaux et numériques : il n’y a rien qui ne vieillit plus vite que les techniques modernes, surtout quand elles sont d’avant-garde…

On est entre le manga, le roman-photo et l’action movie, et une fois qu’on est dedans on oublie un peu la technique à moins de se remémorer trop facilement les modèles 3D utilisés par les jeux vidéos de époque (il y a un officier de police qui ressemble furieusement au Webster de la saga Resident Evil). Mais on reconnaît tout de suite le style de Buichi Terasawa, ici plus proche du sombre Midnight Eye Goku que du flamboyant Space Adventure Cobra (et après tout on est peut être ici dans le chaînon manquant de l’Univers Zéro reliant toutes les œuvres de l’auteur). Alors oui on reconnaît tout de suite aussi son goût pour les bimbos bien boobées (les fameuses Cobra Girls), mais ici la bimbo est badass et seule héroïne du show : elle fracasse tout sur son passage et tabasse tout le monde pour remonter le fil de l’intrigue, une véritable Dirty Harry au féminin qui remplace la testostérone par les œstrogènes !

Les côtés enquête, action et science-fiction sont bien rendus, le tout saupoudré par une bonne dose d’érotisme, mais j’ai eu la désagréable impression que l’histoire finissait avant d’avoir vraiment commencé, sûrement parce qu’en bon connaissance des œuvres de Michael Moorcock le mangaka développe une intrigue métaphysique un peu hors sol…
ATTENTION SPOILERS On a un détournement de La Belle et la Bête (mis en scène par des détournements du dessin de Boris Vallejo et Julie Bell intitulé Demon Lover) avec un alien immortel mi-ange mi-démon qui est en quête de drames et de tragédies pour tromper son ennui : d’un côté il deal des trous noirs pour provoquer les catastrophes qui changerons la trame de l’Histoire de civilisations entières, d’une autre côté il dédouble l’héroïne en une entité gouvernée par la raison qui l’observe de loin et une entité gouvernée par la passion dont il fait sa partenaire… Je ne sais pas si c’est freudien ou jungien, mais tout cela finit un peu en queue de poisson ! FIN SPOILERS

 

PS : je note qu’en VO le Gun Dragon est comparé au Shinsengumi, cette légendaire unité d’élite de la fin du Shogunat qui avait pour principale caractéristique d’être méritocratique, donc d’accueillir de manière absolument mixte aristocrates et roturiers en ne recrutant que sur le seul talent ! Évidemment elle a été la cible de toute la haine de la noblesse japonaise qui fit tout pour éliminer jusqu’au dernier de ses membres, et le dernier d’entre Hijikata Toshizô aka le véritable « dernier samouraï » s’est battu jusqu’à son dernier souffle pour défendre la République d’Ezo contre le Japon impérial déjà raciste, suprématiste et totalitaire sous les applaudissement de la ploutocratie mondialisée et des États-Unis prétendus défenseurs de la liberté… Ce n’est pas un hasard car le mangaka d’Hokkaido comme tous ses collègues régionaux n’a jamais caché être en très en colère contre notre Monde De Merde !!!

note : 6/10

Alfaric

Parce que notre avis n’est pas le seul qui vaille, quelle note mettriez-vous à cet ouvrage ?

 
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