Moto Hagio, Moare Ohta, Takayuki Takeya, Yasushi Nirasawa, Hiro Mashima, Peach-Pit, Takatoshi Kumakura, Ryoji Minagawa, Riichi Ueshiba, Hiroshi Endo, Yukari Takinami, Akira Hiramoto
(scénario & dessin)
d’après Hitoshi Iwaaki

Neo Parasite

Manga, science-fiction / horreur
Publié en VF le 19 février 2020 chez Glénat
Publié en VO en 2016 par Kodansha dans Afternoon (« Neo Kiseijuu / ネオ寄生獣 »)

Douze grands auteurs se sont rassemblés pour créer cette anthologie officielle autour de l’œuvre culte Parasite. Suite, spin-off, mélange d’univers, aspects non évoqués dans le manga… Chaque auteur a rendu hommage au manga de Iwaaki à sa façon : réflexion sur l’humanité par Moto Hagio, combats militaires par Ryoji Minagawa, parodie érotique par Akira Hiramoto (Prison School), ou improbable fusion de Lucy et Miggy par Hiro Mashima (Fairy Tail)… L’univers de « Parasite » est décidément un très bon point de départ pour développer son imagination !

Nous sommes en face d’un recueil de 12 récits qui sont censément être autant d’hommages au manga Kiseiju / Parasite, édité en France pour la réédition du manga Kiseiju / Parasite (ceci expliquant cela). Il y a tellement de choses à dire avec ces 12 récits que ce n’est pas ici que je vais vous présenter la série Kiseiju / Parasite (ne vous inquiétez pas cela ne va pas trop tarder, du moins je l’espère car elle m’a frappé du Syndrome de Stendhal). Disons que dans les années 1970 un certain Go Nagai a traumatisé à jamais toute la Planète Mange avec un certain Devilman (les vrais savent), et qu’à ce jour je suis persuadé qu’il n’y a que deux mangas qui aient réussi à aller aussi loin que lui : face au nihilisme (oui parce que Devilman ça ne finit pas bien, mais alors pas bien du tout !), Hitoshi Iwaaki a choisi résolument lui la voie de l’optimiste, tandis que fidèle à lui-même Kentaro Miriua a passé plus de 30 ans de sa vie à semer des petits cailloux blancs dans les deux directions à la fois… (et je pourrais vous vendre la série rien qu’en vous disant que James Cameron en a repris plusieurs éléments et passages pour réaliser son Terminator 2) Dans un recueil il y a toujours du bon et du moins bon, mais là le bon est très bon et le mauvais est très mauvais donc on a une liste d’auteurs à découvrir et une liste d’auteurs à fuir !

 

Moto Hagio, Sur l’Estier de l’Yura : 4/5
Yura n’est pas une enfant comme les autres. Sa mère est morte sans lui avoir donner de nom, et personne ne veut lui dire qui elle était et comment elle est morte. Et Yura dispose également d’une mémoire totale qui augmente terriblement son Quotient Intellectuel mais qui diminue fortement son Quotient Émotionnel. Mais surtout elle entend depuis toujours des voix qui dans sa tête qui lui disent constamment deux choses : « tais-toi », et « tue-les »…
Adoptée par sa tante et son oncle avant de déménager dans une région littorale restée plutôt rurale, Yura n’est pas expressive voire carrément neurasthénique (est-ce que l’auteur a voulu aborder le problème de l’autisme ?). Pourtant elle se lie profondément d’amitié avec son camarade Ju qui est son opposé en tout : il est expansif, elle est taciturne, il est écorché vif, elle ne ressent rien ou presque, il déteste la violence, elle s’en moque, il veut sauver le monde entier, elle n’en a que faire. Mais ce qui les rapproche, c’est qu’ils ont tous les deux perdus leurs parents, que tous les deux ne savent pas pourquoi, qu’ils sont tous les deux élevés par leur tante, et qu’ils se posent tous les deux les mêmes questions : Qui suis-je ? d’où viens-je ? Que veux-je ? Où vais-je ?
Yura ressent d’étranges émotions durant la danse de l’Acte de la Perle lors d’une représentation théâtrale, et en apprenant le nô les voix dans sa tête se taisent. Quand le maître choisit Ju pour ses sentiments plutôt qu’elle et son talent, elle ne ressent rien ou presque et continue son chemin avec ses questions sans cesser d’être ami avec Ju… Mais personne n’échappe à son destin !
Je ne connaissais Moto Hagio que pour sa réputation de révolutionnaire du shojo dans les années 1970 et pour son influence sur le travail de Riyoko Ikeda l’auteure de La Rose de Versailles / Lady Oscar. Force est de constater que sa réputation n’est pas usurpée : elle s’empare de l’universe d’Histoshi Iwaaki pour le marier à son imaginaire, et c’est un tour de force que d’offrir autant d’émotion avec un personnage qui en ressent aussi peu. Car ce n’est pas le passé et le secret de Yura qui est le moteur de l’action, puisque tout est spoilé dès le départ (et si à la fin Shinichi ne lui dit qu’une toute petite partie de la vérité elle est suffisamment intelligente et intuitive pour tout découvrir par elle-même). Non, le moteur de l’action, c’est le passé et le secret de Ju ! Et il y a bien un monstre, mais celui-ci est humain ou en tout cas prétend l’être…
ATTENTION SPOILERS Son père s’est enfui pour ne pas payer ses dettes et sa mère se serait suicidée pour échapper à la honte et au chagrin. Mais la vérité est que son père s’est endetté pour céder aux caprices de son fils aîné pervers narcissique persuadé que le monde ne méritait pas son génie, qu’il a fui pour échapper à sa vengeance qui il a perdu les moyens de les financer, et que ce dernier a rabattu sa colère sur un autre cible en tuant sa mère. Issei finit par sortir de prison plus tôt que prévu en raison de son âge lorsqu’il a tué, et il revient au pays pour finir le boulot en s’en prenant à sa tante et à son frère pour faire sortir son père de sa cachette et le tuer à son tour. Entre terre et mer, le climax est terrible : Issei a pris en otage Yura pour faire parler Ju, et Ju qui a promis de ne faire de mal à aucun être vivant ne sait plus à quel saint se vouer. Yura qui sait qu’elle ressent de l’empathie pour peu de choses et que Ju ressent de l’empathie pour tant de choses décide de porter sa peine à sa place et lui demande la permission de tuer à sa place : c’est ainsi qu’une pré-adolescente exécute avec détermination et sang-froid un serial-killer en puissance. Ju retrouve sans père, mais Yura reste seule. Pourtant elle connaît désormais la vérité sur sa mère qui n’était pas humaine, et humaine Yura désire elle le rester grâce à tout ce que Ju lui a appris sur l’humanité. FIN SPOILERS
J’ai quand même trouvé les dessins très inégaux et/ou hétérogènes. La mangaka a désormais plus de 70 ans et elle n’a plus la fougue de ses vingt ans, mais surtout elle incarne tellement bien une époque que soit son travail a beaucoup vieillit soit il ne vieillit plus du tout. Et là j’ai trouvé qu’on était un peu entre l’un et l’autre…

 

Moare Ohta, Eat It : 4/5
Le récit est consacré à un alien anthropophage qui est finalement devenu vegan et animaliste. Nitaro Yamawaki est un parasite âgé de 140 ans qui revient sur son existence. Rescapé de la purge anti-parasite, il a épousé sa collègue de bureau pour pouvoir la dévorer plus discrètement. Mais il n’a pu se passer de sa cuisine, et s’est ainsi qu’il a renoncé à l’anthropophagie pour devenir père, grand-père et arrière-grand-père. Mais depuis la mort de son épouse il n’a jamais retrouvé la cuisine qui l’a fait changer d’avis sur les humains. Il est sur le point de céder à ses vieux démons en dévorant l’un des ses descendants, quand un événement imprévu lui rappelle que finalement à force d’imiter les humains lui aussi en est devenu un…
Moare Ohta reprend toutes les thématiques d’Hitoshi Iwaaki en reprenant le style de la série d’origine tout en le modernisant. En voilà un qui a tout compris, et je vais me pencher sur sa bibliographie !

 

Takayuki Takeya, Les Regrets de mémé : 1,5/5
L’auteur est modéliste donc je ne sais si son travail est graphique ou plastique. Dans tous les cas je n’ai pas du tout aimé son histoire de grand-père parasitée dans un trou paumé attaqué par un ours…

 

Yasushi Nirasawa, Paragant : 2,5/5
Le défunt Yashushi Nirasawa designer pour le monde de la télévision et du jeu vidéo raconte en quelques pages une histoire d’oppression, de résistance et de quête de liberté sur une planète alien en rendant hommage à Hidden son film préféré. Je n’ai pas accroché, mais il avait eu une belle idée quand même…

 

Hiro Mashima, Lucy et Migy : 3/5
Qu’est-ce qu’il est maladroit mais qu’est-ce qu’il est sympa ce Hiro Mashima ! Il s’amuse à condenser les premiers chapitres de la série avec Lucy à la place de Shinichi et le chat Happy parasité à la place du chien lovecraftien. Je ne sait pas si cela sert à quelque chose de réaliser la version comique d’une grande tragédie, mais j’ai bien ri quand même…

 

Peach-It, Les Leçons du Professeur Ryoko Tamiya : 1,5/5
Une parodie shojo et ecchi de la série d’origine où tout tourne autour du cul. C’était ridicule !

Les guerres vont continuer tant qu’il y aura des pontes avec des armes à écouler…

Takatoshi Kumakura, L’Alternance : 4/5
Comme dans Eat It, Takatoshi Kumakura reprend les thématiques est les graphismes de la série d’origine, et tout se passe dans les dialogues… Dans la campagne, deux parasites se rencontrent une nouvelle fois : celui qui se cache dans la peau d’un bobo citadin en vacances parle avec celui qui se cache dans la peau d’un prolo campagnard au travail. Le premier suspecte le deuxième d’avoir dangereusement changé, mais le deuxième explique le plus rationnellement du monde comment il est passé de prédateur à éleveur : sa famille lui sert de corps de rechange, et les clients de ses produits biologiques de nourriture. Le premier n’est pas convaincu, même quand le deuxième lui indique comment se nourrir de campeurs sans laisser de traces. Pire ses doutes se renforcent quand il lui demande de ne jamais revenir chez lui…
L’avant-dernière page est pleine de non-dits pour ne pas dire de suspens hitchcockien. La dernière page apporte la même conclusion que dans Eat It : certains parasites ont côtoyé de trop près les humains pour ne pas le devenir à leur tour (ce qui fait écho à l’évolution de la série d’origine où les aliens unis finissaient par se diviser avant que le héros qui protégeait les humains des aliens ne se mettent à protéger les aliens des humains)… Mais c’est plus que cela en fait : tout société inégalitaire ne peut pas rester soudée et est condamnée à se séparer voire à se diviser entre conservateurs à qui la vie a souri et qui ne veulent pas que le système change, et réformateurs à qui la vie n’a pas souri et qui veulent changer le système. En parallèle de ses dialogues, le mangaka a parfaitement utilisé le droit de quota de flashbacks pour montrer que son prolo paysan en a bavé et que cela lui a fait changer d’idées tant sur la vie que sur l’humanité ! La Planète Manga a toujours compté en ses rangs un courant anti-système, mais je le dis et je le redis pour la énième fois depuis la crises des subprimes celui-ci est devenu plus ou moins majoritaire. Que va-t-il se passer lors de la prochaine crise que tous les spécialistes jugent imminente ? La réalité va dépasser la fiction, et d’une manière ou d’une autre on v a tous en chier… (si l’humanité peut survivre aux saute d’humeur d’un président américain disposant de plusieurs milliers de bombes nucléaires)

 

Ryoji Minagawa, Perfect Soldier : 4/5
Les Américains sont toujours à l’affût pour dénicher de nouveaux et meilleurs moyens de tuer leurs prochains. C’est ainsi que parasites ont été épargnés pour servir d’armes vivantes contre les bougnoules, les niakoué et les pédés (ne pas taper, c’est le Commandant Sylvestre qui le disait dans Les Guignols de l’Info). Max continue de se poser des questions existentielles sur lui-même, son espèce et sur l’humanité, quand il découvre que le camp adverse (un pays musulman random qui pourrait être l’Afghanistan) a eu la même que les USA : utiliser les parasites comme arme de destruction massive… S’ensuit un choc de titans où chacun s’aperçoit combien son adversaire a évolué pour être fort. Mais il ne peut avoir qu’un vainqueur : le perdant demande au gagnant de continuer à évoluer pour devenir « le soldat parfait », celui qui sera assez fort pour détruire l’humanité à lui tout-seul !
C’était court, c’était intense, c’était excellent : j’étais déjà dans l’adaptation animée tellement c’était ouf, donc je note le nom du l’auteur Ryoji Minagawa auteur du manga Peacemaker.

 

Riichi Ueshiba, Le Voyage de Migi : 3/5
Un beau récit dans lequel je ne suis pas arrivé à rentrer. Nous visitons en compagnie de Migi sans aucun texte un univers foisonnant, fantastique, onirique voire psychédélique. Puis à la fin Migi se rend compte qu’il voyage dans son propre univers intérieur et qu’à l’extérieur les années ont passé et que Shinichi et Satomi ont fondé une famille qui s’est agrandie… Visuellement très intéressant : Riichi Ueshiba est peut-être un auteur à découvrir ?

 

Hiroki Endo, Edible : 4/5
L’humanité s’est lancé à la conquête des étoiles et elle continue à dominer et exploiter des peuples entiers (car la fin du monde interviendra avant celle de l’impérialisme stade ultime du capitalisme). Nous suivons un commando humain guidé par un éclaireur alien, ce dernier tombe sur un résistant contaminé par un parasite que dans les deux cas il ne connaît que trop bien : débute un combat de ouf, et il ne peut en rester qu’un !
Putain ça fait du bien de retrouver Hiroki Endo après tant d’années : ce grand mangaka m’a manqué, et il serait grand temps qu’un éditeur ressorte sa série Eden. Après l’auteur n’est pas satisfait de son propre travail car il explique qu’il voulait rendre hommage à Aliens de James Cameron et qu’au final il a réalisé un ersatz d’Avatar de James Cameron. Je ne sais pas comment doit le prendre James Cameron qui est fan de la série d’origine…

 

Yukari Takinami, Notre Edoka, Parasitée ! : 1/5
Shinichi avait vu son bras droit parasité par Migy, Edoka voit sa foune parasitée par Fouffy, d’où une suite de gags manga en 4 cases où tout tourne autour du cul. C’était ridicule !

 

Akira Hiramoto, Moi et Gen le Goitreux, parasites : 1/5
Kenji et Gen sont deux parasites recueillis par une grand-mère. Ils passent leur temps à boire, à manger, ainisi qu’à la harceler et à l’agresser sexuellement. Quand elle arrive enfin à s’en débarrasser en les jetant à la porte, ils reviennent rapidement par la fenêtre… C’était ridicule ! (sans parler des situations malsaines, car on est à la limite de l’enlèvement, la séquestration et le viol de ménagères de plus de 50 ans) !

note : 5/10

Alfaric

0 commentaires

Laisser un commentaire

Pin It on Pinterest

Share This