Isabelle Dethan
(scénario & dessin)

Le Roi de Paille, tome 2 :

Le Couronnement de la reine morte

Bande dessinée, histoire / antiquité
Publiée le 22 janvier 2021 chez Dargaud

L’Egypte et Babylone : deux empires parmi les plus puissants de l’antiquité. Deux monarques face à face, en lice pour la domination du Proche-Orient. Et, entre les deux, en guise de pions, leurs propres enfants…

Dans ce tome 2 intitulé Le Couronnement de la reine morte (misère que ce titre qui spoile tout ou presque), nous sommes toujours en 563 avant J.-C., entre la chute de l’Empire Assyrien et l’ascension de l’Empire Perse, et Égyptiens et Babyloniens essayent de tirer les marrons du feu sous la surveillance des Mèdes en embuscade pour faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre (ou pour tirer la couverture à eux)…

Neith et Sennedjem sont comme une bonne partie du peuple hébreux en captivité à Babylone, et s’ils ont sauvé leur peau ils bel et bien raté leur évasion pour retourner en Égypte. Neith continue d’être la nourrices des enfants du prince héritier, tandis que Sennedjem est en planque en attendant que Ombre envoyé par leur père organise une nouvelle tentative d’évasion…
Le roi Nabû-Kuddurri-Usur veut que son fils épouse une pré-adolescente perse pour raison diplomatique, le prince héritier Amel-Marduk déclare qu’il restera fidèle à sa concubine Shamhat, et l’ambassadeur perse qui menace Babylone de représailles demande au roi d’assassiner la femme et les enfants de son fils préféré pour faire table rase du passé La tragédie shakespearienne est inspirée du théâtre antique, lui-même inspiré des drames historiques et mythologiques : le destin est en marche, il a écrit le rôle de chacun, et tout est résolu dès la page 20…

– Tu ferais un bon espion !
– Ou un bon diplomate : c’est la même chose, avec un titre.

ATTENTION SPOILERS Neith et Sennedjem arrivent à sauver les enfants mais pas la femme, et Amel dévasté part en guerre contre son père et les Perses. Neith et Ombre partent en planque dans le Sinaï, avec la princesse perse que le prince voulait tuer et qui chouine parce qu’elle veut retrouver le luxe auquel elle a été habituée. Pendant ce temps à Babylone Amel qui sombre peu à peu dans la folie combat aux côtés de Sennedjem, présumé mort et ressuscité et que personne ne veut affronter de peur d’être contaminé par sa malédiction… Le Pharaon et le Shah observent attentivement la confrontation entre le père et le fils, et le roi est finalement rattrapé par sa malédiction. Sennedjem retourne au pays pour être purifié et occuper un grand poste dans l’armée, mais Neith se fait passer pour morte avec la complicité d’Ombre car elle préfère la liberté au luxe associé à l’obligation de passer par la couche de son géniteur (les élites autoproclamées, le petit monde de l’entre-qu’eux, les incestes avec leurs abus sur mineurs divers et variés : on connaît malheureusement la chanson)… FIN SPOILERS

Isabelle Dethan semble connaître aussi bien les mécanismes de la tragédie que Jacques Martin. Et elle continue de s’insérer dans les ombres de l’Histoire pour raconter ses histoires. Œuvre après œuvre elle continue de rendre hommage à cette antiquité qu’elle aime tant avec. Mais elle n’est pas dupe, et traite des sujets sensibles d’un brûlante actualité (sexisme, suprématisme, et donc forcément esclavagisme) avec beaucoup plus de subtilité que ces satanés Social Justice Warriors qui nous pourrissent la vie avec leur « cancel culture » (le politiquement correct poussé à son paroxysme, à savoir censurer et de réécrire l’Histoire pour éviter de froisser la susceptibilité de telle ou telle minorité mise en avant par les bobos hipsters du moment).
Mais ce tome m’a fait comprendre ce qui m’a toujours turlupiné chez l’auteure. Quels que soient leurs qualités, ses récits souffrent toujours d’un problème de rythme pour ne pas dire de construction. Ici tout est dit dès la page 20 alors qu’il y a plus de 50 pages. On aurait donc pu avoir 3 voire 4 tomes pour bien équilibrer l’intrigue et son évolution (la page 20 aurait ainsi été le cliffhanger d’un tome 2 voire d’un tome 3), et on pourrait faire la même remarque pour tout ce qu’elle fait… Isabelle Dethan est une grande artiste, mais malgré toute sa bonne volonté elle reste malheureusement meilleure dessinatrice que scénariste. Pourtant il lui manque tellement peu pour tutoyer les plus grands !

note : 8/10

Alfaric

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