Luc Ferry (histoire)
Clotide Bruneau (scénario)
Giuseppe Baiguera (dessin)
Didier Poli (direction artistique)

La Sagesse des mythes :

L’Odyssée tome 4,

Le Triomphe d’Ulysse

Bande dessinée, fantasy / mythologie
Publiée le 02 décembre 2020 chez Glénat

Ulysse est enfin arrivé à Ithaque, la cité dont il est le souverain légitime. Tout en dissimulant son identité, il rejoint le palais pour découvrir les manœuvres incessantes des prétendants au trône. Avec l’aide de quelques compagnons triés sur le volet, dont son fils Télémaque, à qui il révèle sa présence, Ulysse va patiemment organiser sa reconquête du pouvoir. Et sa revanche sera sans pitié…​

​Le retour d’Ulysse est un coup d’État qui se traduit par le massacre des prétendants. Il est seul contre tous, bolossé pas ceux qui sont riches et puissants et entendent bien le rester et l’être plus encore en s’emparant d’Ithaque. Mais il a le bon droit pour lui, et la justice immanente marche à ses côtés… C’est un épisode marquant de la littérature antique, et on l’a récité et l’a joué pendant des siècles sur tous les rivages de la Mer Méditerranée, avant d’être repris par les artistes du monde entier (je citerais Le Retour de Ringo de Duccio Tessari daté de 1965, qui adapte en western ce passage de L’Odyssée)…

Si on met de côté la superbe illustration de couverture de Fred Vignaux, c’est toujours aussi moyennement moyen.
– Sur le fond ce n’est pas spécialement mauvais, mais on met en avant des détails qui n’amènent rien au récit mais qui sont jugés cruciaux par Luc Ferry, et on survole, on expédie voire on oublie des points importants parce que Luc Ferry en a rien à faire…
– Sur la forme ce n’est pas spécialement mauvais, mais ça manque cruellement de saveur : pas d’énergie, pas de souffle, pas de dynamisme, pas d’envergure…
On est dans un ouvrage de vulgarisation certes, mais ce n’est pas une excuse pour passer aussi facilement en mode OSEF !

– Ulysse réussissait à bander cet arc… Comment pourrais-je prendre pour mari un homme incapable de l’égaler ?

La série télévisée d’Arte avait eu le mérite de présenter Ulysse en mode John Rambo atteint de troubles de stress post traumatique, ici dans une bande dessinée destinée au public scolaire (sic) Ulysse ne fait pas de quartier, exécutant violemment ceux qui abandonne les armes pour se rendre, pendant en masse les servantes qui n’ont pas résisté aux avances des prétendants (et en cela il va beaucoup plus loin que les résistants de 1946) et torture avec une cruauté inouïe telle ou telle connaissances ayant frayé avec l’ennemi… Est-ce la morale prônée par Luc Ferry ? Pour rattraper le coup il fait dans la guimauve en conclusion : dans le récit original, jusqu’à la fin Ulysse doutait de la fidélité de son épouse, et la soumettait subtilement mais fermement à la question. Mais ici c’est happy end avec deus ex machina !

J’aimerais être aussi indulgent que mon camarade Davalian et me contenter de dire que pendant 8 pages Luc Ferry réalise un compromis entre l’autocitation, l’autosatisfaction et la paraphrase mais c’est au-dessus de mes forces (sans parler de l’autopromotion pour ses autres « œuvres », ou des nombreux passages aussi indigestes qu’incompréhensibles)…

Déjà Luc Ferry se contredit car Ulysse fait le contraire de ce qu’il dit. Ensuite Luc Ferry convoque les mânes de Sénèque, qui grâce à l’argent de la spéculation immobilière ne buvait que des grands crus dans œuvres d’art réalisées en métal précieux, ou Horace flagorneur des puissants vivant de ses rentes après avoir été intermédiaire dans le monde de l’art (mais aussi celles de Nietzsche : on se demande ce que ce dernier vient faire ici). « Carpe Diem », il faut vivre l’instant présent ne se insouciant ni du passé ni de l’avenir, comme n’importe quel jet-setter perdu dans ses univers artificiels…

Pour Luc Ferry cela consiste à se consacrer aux loisirs quand tu es riche (remember ses nombreux soucis d’emplois fictifs), et à travailler et à se taire si tu l’es pas comme le disait Guizot sous la Monarchie de Juillet au XIXe siècle (remember ses saillies sur ces « salauds de pauvres »). Et je vous grâce de ses réflexions sur « la séduction d’Ulysse » qui respirent à plein nez le vieux beau en manque de chair fraîche…

PS: qu’un mec avec aussi peu de recul et d’esprit critique soit invité partout pour donner son avis en dit long sur le niveau de médiocrité médiatique de notre pays, mais qu’en plus on fasse la promotion partout de ses œuvres sans recul et sans esprit critique cela en dit encore plus long sur ledit niveau de médiocrité médiatique de notre pays… Entregent, entre-soi, entre-qu’eux, l’élitisme sans élites semble avoir de beaux jours devant lui !

note : 4/10

Alfaric

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