Shinya Umemura (scénario)
Ajichika & Takumi Fukui (dessin)

Valkyrie Apocalypse, tome 6

Manga, fantasy / fantastique
Publié en VF le 05 novembre 2020 chez Ki-oon
Publié en VO depuis 2017 chez Tokuma Shoten
(« Shuumatsu No Valkyrie »)

​Le duel qui opposait Kojiro Sasaki à Poséidon s’est finalement achevé sur un résultat inattendu : l’humanité remporte en effet sa première victoire ! Folles de rage, les divinités grecques sont bien déterminées à laver leur honneur et, cette fois, c’est le puissant Héraclès qui entre dans l’arène… Pour espérer vaincre ce héros épris de justice, Brunehilde n’hésite pas une seconde. C’est tout simplement le mal incarné que la valkyrie choisit d’envoyer au combat en la personne de Jack l’Éventreur, le tueur en série le plus célèbre du XIXe siècle !

Héraclès est d’autant plus puissant que ses techniques de combat acquises lors de ses 12 travaux sont capables de pulvériser tout ou presque y compris les autres dieux (en contrepartie de tatouages vivants qui dévorent sa propre vie : Buichi Terasawa forever, les vrais savent). Pour l’emporter Jack l’Éventreur ne peut compter que sur la ruse, donc ses fuites, ses mensonges, et ses replis stratégiques… Ses trucs et astuces destinés à amener son adversaire au centre de la toile d’araignée qu’il a tissée sont d’autant plus efficaces sur son adversaire que ce dernier met un point d’honneur à toujours être « fair play ». Et c’est là que ça devient absolument génial, car au-delà de tous les twists développés autour des ruses de Jack l’Éventreur pour vaincre Héraclès et au-delà de tous les actes de bravoure d’Héraclès pour vaincre Jack l’Éventreur, comme dans tout shonen nekkestsu qui se respecte l’affrontement est moins physique que psychologique voire idéologique…

Car si Jack l’Éventreur est capable d’anticiper intellectuellement tous les actes d’Héraclès, Héraclès lui est capable d’anticiper émotionnellement tous les actes de Jack l’Éventreur car il a expérimenté tous les heurs et malheurs de l’humanité. Héraclès sait qu’il défend une cause qui n’est pas la sienne honneur oblige, mais il se fixe comme défi de sauver Jack l’Éventreur du Côté Obscur ; Jack l’Éventreur sait qu’il défend une cause qui n’est pas la sienne parole de gentleman oblige, mais il se fixe comme défi de faire passer Héraclès du Côté Obscur… La rédemption du serial killer est devant lui, mais il n’est pas encore prêt à l’embrasser !

C’est en forgeant qu’on devient forgeron et les auteurs sont devenus suffisamment expérimentés pour équilibrer de mains de maîtres le droit de quota de flashbacks :
– d’un côté nous avons un héros universel résolument optimiste inspiré du Captain America de Joe Simon et Jack Kirby (qui comme il est universel rappelle ô combien le héros russe Ilya de Mourom) : seul celui qui a connu les affres de la faiblesse peut user de la force avec sagesse… Epicness to the max, surtout quand il déclare à l’armée des dieux « vous ne passerez pas » !!!
– d’un autre côté nous avons un vilain universel résolument pessimiste inspiré du Jean-Baptiste Grenouille de Patrick Süskind (ceux qui ont lu ou vu Le Parfum savent) : le serial killer aux yeux vairons est un empathe qui voit les émotions, et il a entrevu la lumière du paradis avant de plonger dans les ténèbres de l’enfer… C’est ainsi que le fils bâtard d’un dandy et d’une prostituée a fini par basculer du Côté Obscur, et que pour retrouver la lumière il recherche la couleur de la peur en tuant de plus en plus de gens à commencer par ses propres parents ! Tragicness to the max !!!

– Si je n’ai pas d’autre option que de m’abaisser à devenir un dieu pour protéger les justes, ainsi soit-il !
– S’abaisser à devenir un dieu ? C’est bien ce qu’il a dit ?! En voilà un qui ne va pas nous faciliter la vie…

On croit assister à un combat du Bien contre le Mal, de la Lumière contre les Ténèbres. Oui mais non : comme le savent les philosophies orientales l’un ne saurait exister sans l’autre. Le réalisateur Tsui Hark avait mis en scène dans Green Snake un chasseur de démon voyant tous les hommes comme des démons, ne sachant plus quoi faire face à des démons agissant comme des humains… Ici Héraclès fait ce qu’il a faire avec tout son cœur, et son adversaire qui voit les plans à l’intérieur des plans le mène par le bout du nez (Loki enrageant de ne pas avoir été désigné pour affronter un adversaire aussi rusé). Mais plus le combat dure et plus le serial killer se met à douter : la bonté, la générosité et la sincérité d’Héraclès sont totales, et Jack l’Éventreur commence à remettre en cause son jugement sur l’humanité et donc sur son propre passé. A-t-il fait les bons choix ? N’y avait-il pas d’autres chemins à arpenter que celui du « chacun pour soi » reagano-thachéro-macronien ??? Finalement le messie du mal qui pensait « il y a ceux qui sont tout et ceux qui ne sont rien » se demande s’il n’aurait pas pu devenir comme Héraclès un champion du bien défendant la liberté, l’égalité et la fraternité…

PS : je dois malheureusement signaler qu’aucun site légal y compris l’éditeur ne propose d’extrait de l’ouvrage, donc je suis obligé de passer par des scantrads pour illustrer cette chronique (preuve encore une fois qu’il y a ceux qui ont la carte et ceux qui le n’ont pas, et ce manga visiblement ne l’a pas et on sait pourquoi)…

note : 8,5/10

Alfaric

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