Sylvain Runberg (scénario)
François Miville-Deschênes (dessin)

Zaroff

Bande dessinée, thriller / horreur
Publiée le 24 mai 2019 chez Le Lombard

« Je m’appelle Fiona Flanagan. Vous ne me connaissez pas, général Zaroff… Et pourtant, il y a peu, vous avez changé ma vie. En tuant mon père, lors d’une de vos sordides chasses à l’homme. Je me propose de vous rendre la pareille ! Mes hommes ont retrouvé votre soeur cadette et ses trois enfants. Ainsi que l’île qui vous sert de repaire… Et cela m’a donné, à mon tour, des envies de chasse ! Qui, de vous ou moi, trouvera votre soeur et ses enfants en premier ? À l’instant où vous lirez ces mots, ils seront déjà sur votre île. Si c’est moi qui les rattrape, je les tuerai. Si c’est vous, il vous faudra les défendre. Car je n’aurai de cesse de tous vous chasser et de tous vous abattre. Afin qu’il ne reste aucun Zaroff en vie dans ce monde. »

Nous sommes en présence d’un chef-d’œuvre de 80 pages auquel il ne manque presque rien pour égaler les plus grands. Les auteurs font parfaitement la transition entre le film d’Irwing Pichel et Ernest B. Schoedsack intitulé Les Chasses du Comte Zaroff, inspiré par la nouvelle de Richard Donnell intitulée The Most Dangerous Game, et leur œuvre qui se veut une suite directe de l’œuvre d’origine…

Cette dernière inventait à la fois les concepts de serial killer et de survival, mais cela allait bien plus loin que cela puisqu’on allait au bout du bout des délires suprématistes des élites autoproclamées, à savoir l’exploitation de l’homme par l’homme illustrée par la maxime antique Homo homini lupus est… Ici les prédateurs deviennent proies et les proies deviennent prédateurs (et inversement, et à plusieurs reprises), et les esprits affûtés auront reconnu que le scénariste Sylvain Runberg qu beaucoup plus à l’aise dans le thriller que dans d’autres genres reprend thèmes et rebondissements de son autre œuvre intitulée Sept Cannibales (on revient à l’ADN premier des récits fantastique où le Mal est en chacun de nous : L’Homme Invisible, L’Île du Docteur Moreau, Docteur Jeckyll et Mister Hyde….)

– Lors de chaque chasse arrive toujours ce moment précieux. Celui où une proie reprend espoir. Une illusion ultime qui n’est que l’expression d’un refus. Un déni commun à tout être vivent se sachant condamné. Celui d’accepter sa mort imminente.

Nikolaï Zaroff aristocrate russe expatrié passionné de chasse a poussé le vice jusqu’à chasser ses congénères, mais vaincu par Sanger Rainsford, il a déménagé du Brésil au Vénézuela sans retrouver la passion de la traque… C’est là qu’il reçoit la déclaration de guerre de Fiona Flanagan fille d’une de ses anciennes victimes qui après avoir tué son beau-frère lui annonce que sa sœur Katarina, son neveu Dimitri et ses nièces Anastasia et Alyona ont été lâchés dans sa nouvelle réserve de chasse et que le premier qui les retrouvera aura droit de vie et de mort sur eux… Le suspense est total, d’autant que les auteurs cultivent le mystère autour de leur personnage principal au-delà du bien et du mal : sociopathe ou psychopathe, pragmatique fan de Marc-Aurèle ou sadique fan de Caligula ? Ses ennemis le voit comme un monstre, sa sœur comme un fou, ses neveux et nièces comme un héros : nous touchons du doigt la quintessence de la sulfureuse philosophie nietzschéenne !
J’ai à un moment regretté qu’on ne fasse pas un Crime de l’Orient Express à l’envers, mais à proie exceptionnelle il fallait des prédateurs exceptionnels à savoir la crème de la pègre new-yorkaise menée par le chasseur expert Joao Pedro Dos Anjos qui ne sait que trop bien à quel surdoué ils sont confrontés…

Les dessins du formidable artiste québécois François Miville-Deschênes sont comme toujours proches de la perfection, mais ici il fait en plus preuve malice en s’inspirant de l’autre film auquel a participé Ernest B. Schoedsack à savoir le légendaire King Kong ! Du coup l’Île du Docteur Moreau, euh pardon l’Île du Chasseur Zaroff ressemble à s’y méprendre à un sosie de Skull Island. Et cela ne fait que rajouter de la supracoolitude à l’ensemble !

note : 9/10

Alfaric

Parce que notre avis n’est pas le seul qui vaille, quelle note mettriez-vous à cet ouvrage ?

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