Marie Bardiaux-Vaïente (scénario)
Emmanuel de Waresquiel (historien)
Andrea Meloni (dessin)

Ils ont fait l’Histoire,

Talleyrand

Bande dessinée, histoire / xviiième siècle / 19ème siècle
Publiée le 10 novembre 2021 chez Glénat

On a fait de Charles Maurice de Talleyrand-Périgord un diable boiteux, un prince immobile, l’image scintillante du mal, le traître de toutes les causes… Peu d’hommes ont su traverser tant de régimes, de bouleversements, de guerres civiles, de coups d’état, de révolutions de palais, sans tomber ni disparaître. A la chute de Napoléon, cet homme d’Etat hors normes, le plus grand tacticien de son temps, subtil visionnaire de l’Europe politique et des rapports économiques entre les nations, connaît l’apogée de sa carrière diplomatique. Et c’est à Vienne, en 1815, que se déploie toute la palette de son génie, lors d’un congrès démesuré, jusqu’à la signature de « la plus belle paix du monde ».

​​Cet album consacré à Talleyrand ne m’a pas enthousiasmé de prime abord, mais il faut dire que le personnage m’était et m’est toujours plutôt antipathique. Marie Bardiaux-Vaïente a fait le choix de centre le récit sur le Congrès de Vienne, grande fête du retour à l’Ancien Régime qui s’étend de 1814 à 1815, où Talleyrand a joué l’Angleterre et l’Autriche contre la Prusse et la Russie, et les petits pays contre les grandes puissances pour qu’on foute la paix à la France. Il est parfaitement complété par le dossier d’Emmanuel de Waresquiel qui brosse la personnalité et le parcours d’un homme de paradoxes et de convictions à la fois, qui fait figure de « kingmaker » de la période révolutionnaire.

Moyennant des passages outre-manche et outre-Atlantique, il est passé à travers toutes les tempêtes politiques, changeant d’allégeance à chaque opportunité de rallier le camp des vainqueurs. Pourtant de son poste de représentant du clergé d’Autun aux Etats-Généraux de 1789 à celui de ministre plénipotentiaire il a toujours défendu l’idée de droit public dans la sphère nationale (une royauté tempérée par un parlement et une constitution) et dans la sphère internationale (un concert des nations tempéré par des traités multilatéraux).

La trahison est une question de date et de moment.

Longtemps surnommé « le chat » l’homme de salon se laisse difficile saisir car il a toujours eu beau jeu de cacher son jeu. Déjà connu lorsqu’il était clerc pour ses frasques sociales, en tant que laïc il n’a cessé de cultiver les réunions mondaines et les intrigues amoureuses de tout temps indispensables sources de renseignements (il est toujours là où il faut au moment où il faut pour savoir ce qu’il faut).

Pour ne rien gâcher, comme tout homme de pouvoir il a eu recours au storytelling pour inventer sa propre histoire à répétition donc son propre personnage selon les lieux et les époques… Homme protéiforme, Talleyrand n’a cessé de se transformer au gré des situations et de ses interlocuteurs. C’est peut-être pour cela que le « prince immobile » a toujours traîné mauvaise réputation, en séduisant puis en décevant lesdits interlocuteurs avec le temps : « le diable boiteux », « l’image scintillante du mal », « l’empereur du vice », « le traître de toutes les causes »…

 

Les dessins d’Andrea Meloni sont satisfaisants, mais les choix scénaristiques ne lui laisse pas beaucoup d’occasion de montrer son talent…

note : 7/10

Alfaric

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