Roy Thomas (scénario)
Frank Thorne (dessin)

Red Sonja

Intégrale : 1976-1977

Comics, fantasy / heroic fantasy
Publié en VF le 06 décembre chez Neofelis
Publié en VO en 1976-1977 chez Marvel Comics
(« Red Sonja, She-Devil with a Sword »)

Pour la première fois en version complète, découvrez les aventures de Red Sonja, la diablesse à l’épée, par son plus mythique dessinateur, Frank Thorne ! Ce volume vous propose 170 pages d’histoires épiques avec 9 épisodes publiés à la fin des années 70 par Marvel Comics et écrits par Roy Thomas (« Conan The Barbarian »), Bruce Jones (« Ka-Zar, The Savage »), ou encore Clara Noto et Ed Sumner. En route avec la guerrière d’Hyrkanie sur les chemins de l’aventure (avec en invité spécial Conan)

Après la tolkienmania, les Américains se sont retrouvés en pénurie de Fantasy, puis ils sont rappelés qu’il existait des écrivains américains de Fantasy comme R.E. Howard, Fritz Leiber et Jack Vance… Marvel Comics s’est jeté sur Conan le Cimmérien bien vendu par Lyon Sprague de Camp et Lin Carter, mais après 1968 survient dans les années 1970 le women’s lib, et les éditeurs cherchent désespérément le moyen de mettre en avant des personnages féminin.

C’est ainsi que Roy Thomas a ressuscité « Red Sonja », étrange personnage de la nouvelle intitulée L’Ombre du Vautour, où l’autoproclamée Sonya la Rousse qui se prétendait être la sœur jumelle de Roxelane l’épouse du Grand Sultan Soliman le Magnifique combattait sur les murailles de Vienne aux côté du chevalier errant Gottfried von Kalmbach juste pour emmerder celui qui avait juré sa perte ! Difficile de construire une série autour d’un personnage aussi mystérieux. Alors on lui a inventé un passé en piochant dans celui d’Agnès le Noire autre héroïne de l’auteur texan, et on a brodé en piochant parmi les nombreuses strong independant women de la bibliographie de l’auteur (toujours qualifié de vil machiste par les SJW d’aujourd’hui qu’ils soient bobos, feminos ou intellos, pourtant je les appelle à nommer les auteurs de strong independant women ayant officié dans l’entre-deux-guerres…

Et comme par hasard ils et elles ferment leurs gueules, et je ne suis pas surpris du tout !) L’anglais Barry Smith, l’américain Roy Krekel, et l’espagnol Esteban Maroto s’essayent au personnage de « Red Sonja, She-Devil with a Sword ». Et quand Frank Thorne reprend le bikini en cotte de mailles de ce dernier, c’est le succès assuré pour l’éditeur mais d’abord et surtout une révélation sur le Chemin de Damas pour le dessinateur qui tombé amoureux de ses modèles et de ses créations va se lancer avec succès dans les comics érotiques…

Alors oui, on ne va pas se mentir, ce fameux bikini en cotte de mailles est ridicule. Mais au départ c’était pour montrer que l’anti-héroïne usait et abusait de ses charmes féminins pour provoquer et tromper ses adversaires. Sauf que les yankees sont prudes, et qu’à la même époque Kazuo Koike allait dans la même veine beaucoup plus loin dans Lone Wolf & Cub et Lady Snowblood (il y a ceux qui sont coincés du cul, et ceux qui ne le sont pas). Peu importe, la série aurait pu marcher sur la tête en utilisant une strong independant woman pour faire du fan service érotique voire carrément du machisme de bas étage, mais Roy Thomas a su compter sur deux anges gardiennes en les personnes de Clair Noto et de Wendy Pini (la reine du cosplay des années 1970 qui ensuite allait connaître fortune et gloire avec sa série Elfquest)…

Sache aussi, ô Prince, qu’alors même que Conan le Cimmérien écumait les royaumes hyboriens, l’un des rares fers dignes de croiser le sien fut celui de Red Sonja, guerrière native de la majestueuse Hyrcanie. Contrainte de fuir sa patrie après avoir refusé les avances d’un roi et l’avoir occis, elle chevaucha vers l’ouest par les steppes turaniennes et fit son entrée dans les brumes obscures de la légende.

Les éditions Neofelis avec d’autres me permettent de redécouvrir les chefs-d’œuvre des comics des années 1970, ce qui me conforte dans mon idée que les Anglo-saxons connaissent une pénurie de talents graphiques assez inquiétante, et c’est les artistes eux-mêmes qui le disent ouvertement (côté films d’animation ils piochent chez les Français, côté série d’amination ils piochent chez les Asiatiques, côté comics ils piochent chez les Latino-américains, et au pire ils peuvent compter sur les Anglais au scénario et sur les Espagnols au dessin pour boucher les trous béants laissés par un système éducatif en ruines que macron et la macronie veulent importer dans notre pays). J’ai lu cette intégrale 1976-1977 avec grand intérêt et grand plaisir, mais je suis obliger de signaler qu’aucun récit n’est finalement abouti. Malgré toute la bonne volonté manifesté, il y a toujours un truc qui ne va pas…

Dans Le Sang du Chasseur, Red Sonja entre en possession d’un trésor maudit prenant la forme d’une clé en or. Tous ceux et toutes celles qui croisent sa toute sont massacrés, et elle fuit à bride abattue pour semer celui qui la traque… C’est ainsi qu’elle finit par rejoindre les bandits de Gromlik, et qu’elle noue une étrange relation avec Dunkin, un adolescent infirme en colère contre la terre entière qui ne cesse de la provoquer et de la bolosser. C’était génial de voir la strong independant woman sans dieu ni maître ne savoir comment se comporter face à quelqu’un situé plus bas qu’elle dans l’échelle sociale et sans aucune ressource pour se battre et remonter les échelons. L’amour et la haine se battaient en duel dans chaque tirade, et il y avait tant à dire et à faire… Oui mais non, on tue tout le monde pour faire table rase du passé et c’est bien d’autant changer de ton et d’orientation entre deux épisodes d’un même récit d’autant plus qu’on euthanasie toutes les promesses qui avaient été faites…
Dans Le Retour de Balek, Red Sonja qui s’est débarrassée de Rejak le Pisteur suit les conseils du défunt Dunkin pour retrouver Neja la Sorcière. Et elle trouve réponse à ses questions avec une vieille femme en quête de pouvoir qui lui raconte l’histoire d’un talos avant de le jeter contre elle. Mais Red Sonja est une survivante, et elle se débarrasse sans coup férir de la créature magicienne et de la créature mécanique…

Les Yeux de la Gorgone est un récit trop court pour exploiter tout son potentiel. Dans une communauté à couteaux tirés car victime d’une gorgone changeant ses victimes en pierre, Red Sonja sauve Unkas l’idiot du village d’un lynchage avant d’être elle-même victime de lynchage.
ATTENTIONS SPOILERS Elle découvre un frère et une sœur, Unkas et Delores, victimes devenues bourreaux qui capturent et asservissent un à un les membre de la communauté qui les a martyrisés après avoir lynché leurs parents. Entre sa sœur qui a toujours cherché à le venger et Red Sonja qui lui a généreusement témoigné de la bonté, Unkas ne sait plus à quel saint se vouer et Red Sonja non plus qui ne sait qui des villageois et du frère et de la sœur elle doit protéger. Où est la morale dans tout cela ? Le sad end est obligatoire ! FIN SPOILERS

L’Attaque du Dieu Ours est lui-aussi un récit trop court pour exploiter tout son potentiel. Red Sonja est attirée par la prime offerte par une communauté zingarienne pour trucider un monstre… Tusan tri-classé guerrier / roublard / troubadour la drague ouvertement, et elle prend un malin plaisir à le bolosser. Toutefois sa compagnie ne lui est pas désagréable, et c’est ensemble qu’il partent en chasse concurrencés par telle ou telle équipe de mercenaires. Les deux compères débattent du naturel et du surnaturel, et quand ils sont ils sont confrontés à la démystification du surnaturel, le surnaturel déboule pour remettre les mortels à la place qui doit être la leur…
ATTENTIONS SPOILERS Les autorités de la communauté zingarienne en mal d’argent malhonnêtement gagné ont ressuscité la légende du Dieu Ours pour attirer et dépouiller des aventuriers en quête de fortune et de gloire, sauf que le Dieu Ours existe bel et bien et a sa propre conception de la justice… Tout cela aurait quand même pu être bien mieux exploité et explicité avec plus de pages ! FIN SPOILERS

On a ensuite un crossover entre les séries Conan et Red Sonja, dans lequel deux factions stygiennes se disputent une page perdue du Grimoire de Skelos, à savoir un agent de l’État et un rebelle en exil tous les deux experts en sorcellerie… Engagée par le rebelle, Red Sonja doit affronter les maléfices de l’agent d’État, avant de tomber sur Conan et Bêlit qui eux aussi veulent mettre la main sur la page du livre maudit tant convoitée (héritage Lovecraft). Tous les deux fiers comme Artaban et têtus comme des mules, l’affrontement est inévitable et mémorable. Et le choc des titans débouche sur une inexorable alliance de circonstances quand les forces obscures de la crevardise leur tombent dessus à bras raccourcis… C’était super frustrant : déjà que le passage du 1er au 2e épisode est plein de hiatus, mais en plus c’est au meilleur moment qu’on nous demande d’aller chercher chez un brocanteur la suite et la fin du récit (parce qu’on est dans un crossover et que l’histoire se termine dans un autre magazine dont l’éditeur n’a pas les droit) !

Dans Le Sang de la Licorne, Roy Thomas a donné carte blanche à ses collègues féminines. Dans les forêts d’Argos, le dénommé Andar de Bezfardar traque une licorne dans l’espoir d’obtenir la vie éternelle. Il obtient le corne tant convoitée, mais Red Sonja sauve la vie de la licorne qui lui rend bien volontiers l’amitié qui lui a été accordée. La guerrière et la jument fantastique vivent leurs vies loin de la folie des hommes, mais la corne de la licorne repousse et Andar de Bezfardar enrage qu’un autre que lui puisse obtenir la vie éternelle… (les intellectuels nous disent que le problème ce n’est pas l’inégalité mais la pauvreté, mais comment rendre le monde meilleur quand la ploutocratie mondialisée à laquelle appartient la macronie unifiée considère que les pauvres doivent êtres très pauvres pour les riches puissent se sentir très riches ?) Chacun rencontre son destin, et la femme guerrière et la créature surnaturelle doivent chacune continuer leur chemin dans la solitude…
Un récit simple voire cliché, mais bien raconté donc plein d’émotion !

Dans Le Démon du Dédale, on combine plusieurs récits howardiens. Red Sonja est prise à partie par un magicien noir prêt à tout et au reste pour libérer un démon de sa prison et un magicien blanc prêt à tout et au reste pour que ledit démon reste prisonnier de sa prison… Red Sonja est l’élue, celle qui pourra le libérer ou le terrasser, et se débarrasse des créatures du mal grâce à l’armée des morts de leurs victimes. Mais face au démon, elle est soumise à la tentation. Et elle tue un monstre, pour libérer un homme… Un récit simple et efficace, qui mine de rien dégage dans son genre de la puissance !

Dans Les Jeux de Gita, à Athos tous les habitants sont riches et rentiers, donc gros, gras et fainéants, à Zotoz tous les habitants sont pauvres et employés, donc maigres, minces et travailleurs. Depuis une éternité les Jeux de Gita les opposent, et les riches enragent de perdent face aux pauvres. Leur reine a donc décider de piper les dés en envoyant à une mort assurée tout prolétaire ayant l’outrecuidance de l’emporter face à un rentier (bref on suit les règles du jeu de cette saloperie de macronie qui divise le monde en deux catégories : ceux qui ont réussi et ceux qui ne sont rien). Sauf que les pauvres ont des valeurs que les riches n’ont pas, n’ont jamais eu et n’auront jamais, et ils préfèrent vaincre et périr plutôt que de baisser la tête et de perdre volontairement… Sous les yeux de Mikal le chroniqueur, Red Sonja participe de son plein gré aux Jeux de Gita pour contribuer à la cause des faibles face aux forts (OMG la ploutocratie mondialisée s’arrache les cheveux voire les yeux de désespoir : et ben, c’est bien fait pour les grandes gueules nanties et pourries gâtées). Elle remporte la victoire face aux champions des riches, puis face à leurs sportifs-esclaves nés et élevés pour vaincre, et enfin face à leur reine sorcière qui use et abuse de noire sorcellerie pour l’emporter !
Quelques années auparavant Tommie Smith et John Carlos levaient un poing ganté de noir lors de l’hymne américain durant les JO de Mexico. Pour ce geste d’engagement démocratique ils avaient été exclus à vie de compétition par le CIO, cette institution ploutocratique qui a ciré les pompes et qui a léché le cul de toutes les dictatures du monde… Merci à ces crevards sans aucune morale qui se sont eux-même condamnés à la damnatio memoriae de les avoir fait entrer dans l’éternité en les transformant en martyrs de la liberté, de l’égalité et de la fraternité… Sic Semper Tyrannis !

note : 7+/10

Alfaric

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