Christian Léourier

Sitrinjêta

Roman,  science-fiction / space-opera
Publié en VF le 05 mai 2016 aux éditions Critic

Il y a fort longtemps, une civilisation a créé la planète Sitrinjêta, une oeuvre d’art à l’échelle d’un monde, qui satisfait tous les sens de n’importe quelle espèce. Mais aujourd’hui, nul ne sait où elle se trouve. Prétextant une mission de fret, le capitaine terrien Hénar Log Korson parvient à convaincre la toute-puissante Transtell de lui confier une astronef et un équipage. Pourtant, c’est bel et bien en quête de la mythique planète perdue qu’il se lance…

Merci Babelio, merci Masse Critique, et surtout merci Critic ! (grâce à ces derniers, je souffre moins quand je songe à la défunte collection Présence du Futur, euthanasiée par qui on sait…)

Avec Sitrinjêta de Christain Léourier, nous un petit space opera qui entre pulp et quête métaphysique rend un hommage presque vintage à ces bons vieux Stefan Wul et Jack Vance : on aurait pu avoir un Farscape à la française, mais au final on se contentera d’un anti Star Strek*, l’auteur prenant plaisir à prendre le contre-pied de l’univers culte de Gene Roddenberry…
Après une mise en place qui semble avoir eu lieu quelque part dans l’univers de Star Wars, on se retrouve dans une bonne vieille course au trésor. Sauf qu’avant d’arriver à destination le capitaine se garde bien d’expliquer à son équipage en quoi il consiste (parce que l’auteur veut bien se garder d’expliquer à ses lecteurs en quoi il consiste). A la limite, la destination importe moins que le voyage et on n’est pas très loin d’un MacGuffin…

On a diverses menaces intérieures :
– la mystérieux contenu de la soute Z
– l’invitée de dernière minute qui s’avère être une invitée de marque
– le capitaine ayant subi une mnémotonie qui ne sait plus lesquels de ses souvenir sont les vrais
– le second métamorphe qui semble prendre son indépendance, et change d’humeur et de sexe
– l’équipage entre grève et mutinerie, donc chacun des membres pourraient être un espion et/ou un saboteur
On a diverses menaces extérieures :
– des Pirates de l’Espâce en veux-tu en voilà…
– les interventions de l’Instance Suprême de la galaxie
– la guerre entre les Kongloïm arachnoïdes et la Ligue des Cinq Sphères
On devine que la quête du Solarien Hénar Log Korson est l’enjeu de lutte de pouvoirs galactiques (qui sont ses véritables commanditaires ?), mais c’est moins une opposition entre ceux qui veulent qu’ils échouent et ceux qu’ils veulent qu’ils réussissent qu’une opposition entre ceux qui veulent tirer les marrons du feu en étant les premiers à remporter le pactole une fois qu’il aura mis la fin dessus… Parce qu’il est la clé dudit trésor, et que ceux qui échouent à ouvrir le coffre au trésor meurent !

Le commandant indique le but, le pilote mène au but, l’équipage adhère au but.

J’ai bien aimé la course au trésor, mais pas trop voire pas du tout son dénouement… le problème c’est que ce dernier occupe un bon tiers du roman ! Ledit dénouement est en 2 temps : Achtung Spoilers !
Dans un 1er temps, avec l’ouverture du Cœur Ardent l’antihéros contrebandier effectue une odyssée vers le passé qui lui permet de retrouver sa mémoire. C’est bien écrit mais on passe d’une ambiance space opera à une ambiance (cyber)punk dans un festival grimdark : la Terre est devenue un enfer ploutocratique où les masses survivent dans des dépotoirs tandis que les élites ploutocratiques se prélassent dans des paradis privés certes, mais marre des nababs pédophiles qui considère l’humanité comme un réservoir inépuisable de jouets à utiliser et ensuite à casser, et surtout marre de devoir être le spectateur de leurs turpitudes dégueulasses… Passez à autre-chose messieurs les auteurs !
Dans un 2e temps, le secret du Sitrinjêta nous est révélé. Pour récréer l’univers il faut être capable au préalable de se recréer soi-même : interactions observateur/observé, relation créateurs/créations, opposition réel/irréel, questionnement sur l’art et le beau, d’où venons-nous ?, qui sommes nous ?, où allons nous ? OK pour les clins d’œil à Isaac Asimov, Roger Zelazny et Philip K. Dick mais basta la philo métaphysique !

Plutôt que de consacrer des dizaines de pages à cela, on aurait pu avoir de meilleures descriptions de tous les aliens sortis de la classification xénologique que l’auteur met en avant en prélude, développer les personnages comme la dualité Hénar/Ullinn par exemple), et étoffer les péripéties du récit histoire de clarifier les tenants et aboutissant de l’intrigue… Parce qu’au final ça manque quand même un peu de véritable fun… Je reste sur un sentiment mitigé, mais l’imagination et le style de Christian Léourier qui font le pont entre différentes époques de la Science-Fiction me plaisent bien… J’irais bien refaire un petit tour dans ses univers à l’occasion !

 

* Déjà le second Svaun, c’est clairement un Vulcain métamorphe et hermaphrodite : on ne pouvait être autrement plus clair sur la référence et la volonté de la détourner !
Dans Star Strek, on avait développé une civilisation galactique sans argent basé sur la solidarité et qui avait pour la résolution de tous les conflits… Dans Sitrinjêta, on a développé une civilisation galactique basé sur l’argent et sur le chacun pour soi et qui a pour but d’utiliser les conflits en cours pour faire encore plus de pognon… du coup on se retrouve dans une transposition intersidérale du monde actuel qui se gargarise d’être en paix parce personne n’utilise d’ADM, mais où les grandes nations en n’ont rien à secouer qu’on s’entretue sauvagement ici ou là tant que cela ne dérange pas trop le big business (Zaïre, Soudan, Yémen, Syrie, ou le génocide au Laos dont les médias n’ont pas envie de parler… Monde De Merde)
OMG Adam Smith, Freidrich Hayek , Margaret Thatcher et Emmanuel dans l’Espâce, mais quelle horreur !!!

note : 6/10

Alfaric

Parce que notre avis n’est pas le seul qui vaille, quelle note mettriez-vous à cet ouvrage ?

 
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