Phillip Kennedy Johnson (scénario)
Riccardo Federici (dessin)

Le Dernier des dieux, tome 1

Comics, fantasy / dark fantasy
Publié en VF le 12 mars 2021 chez Urban Comics
Publié en VO à partir d’octobre 2019 chez DC Comics (« The Last God »)

La légende disait la chute du Dieu du vide.
La légende chantait la victoire des Traquedieux.
La légende proclamait la libération de Cain Anuun.
Mais bien rares sont les légendes à dévoiler toute la vérité.

Urban Comics nous offre avec Le Dernier des dieux le seul titre non super-héroïque (pour ne pas dire non batmanesque) de la collection « Black Label » de DC Comics. D’habitude les Yankees nous aguichent avec de magnifiques illustrations de couverture (ici signées Kai Carpenter), mais ici les graphismes magnifiquement réalistes de l’italien Riccardo Federici sont tout bonnement excellents ! Et comme ils sont plus proches de l’art séquentiel européen que l’art séquentiel américain, c’est une chouette idée de publier cela en format BD (le livre-objet est aussi réussi que complet). Pour ne rien gâcher j’ai retrouvé les mêmes vibes dans La Compagnie des Lames (une excellente BD Dark Fantasy malheureusement inachevée pour des raisons éditoriales que la raison ignore)…

Il y a 30 ans le fléau de la Pestefleur s’est répandu sur les royaumes des Hommes, des Elfes et des Nains. Une courageuse compagnie de héros appelés les Traquedieux s’est constituée pour combattre le Mal : Veikko al Mun le roi passeur elfe, Skol l’omnisciente l’archimage, Jorunn le plus vaillant des Archenains, le puissant rivéen Haakon le Honni, Cyanthe l’archère maîtresse des bêtes et Tyr le sauveur venu du nord. Et au bout de leur quête, c’est au bord du monde et tout en haut de l’Escalier Noir que Tyr a pourfendu le Dieu du Vide pour ramener la paix et la prospérité dans toutes les contrées…

De nos jours le roi Tyr et la reine Cyanthe sont passés de sauveurs à souverains du monde libre, et ils fêtent dans leur capitale de Tyrgolad le 30e anniversaire de leur victoire. Sauf que le fléau de la Pestefleur est de retour, et que ça première victime est celui qui naguère y avait mis fin…

– Qui a pu faire ça ?! On peut dire ce qu’on veut des Aelves, mais aucun herbivore ne commettrait pareil massacre.
– Tout juste. Quand les Aelves tuent, ils le font en silence.

On utilise les classiques de la fantasy : le méchant millénaire, la compagnie de héros, la quête pour le vaincre, mais aussi les gladiateurs bien musclés et les esclaves bien galbées (ainsi que les cartes, les chansons, les poèmes et les récits du temps jadis issus du tolkienisme). Mais on comprend très rapidement que nous sommes dans un village de Potemkine : le sauveur est un tyran, les héros sont des parias, les alliés n’en sont pas, et suprématisme et racisme règnent en maîtres… Est-ce qu’on nous aurait menti l’insu de notre plein gré ? Car quand on mélange les horreurs lovecraftiennes aux merveilles tolkieniennes, qu’est qu’on obtient avec un bon coup de shaker ? Un univers Dark Fantasy à la Warhammer ! (j’ai pensé à l’héritage Resident Evil, mais la franchise de Capcom est une transposition du jeu vidéo Alone in the Dark adapté des écrits de H.P. Lovecraft)

Phillip Kennedy Johnson est un auteur particulier, car cette Américain issu du Vieux Sud a eu une longue carrière de musicien classique avant de devenir scénariste de comics. Ici il montre qu’il a bien réfléchi quant aux fondamentaux de ses genres de prédilection. En fantasy classique il y a deux grands types de récits : ceux avec un méchant résurgent, et ceux avec un méchant établi. Ici lecteurs et lectrices sont volontairement mis dans l’ambiguïté, et toute la force du récit c’est de mettre en scène la quête du passé centrée sur Tyr avec Cyanthe et Veikko al Mun comme témoins, et la quête du présent centré sur Eyvindr avec Cyanthe et Veillo al Mun comme témoins également (et je soupçonne presque les appendices de développer une troisième storyline avec le point de vue du futur).

On fait avancer à la fois simultanément et alternativement les récit du temps passé et le récit du temps présent pour savoir dans quel type de récit on est, donc jusqu’à quel point on a menti sur les Traquedieux. Le scénariste a semé dans ses premiers chapitres pas mal de petits cailloux blancs, donc impossible de savoir si les nouveaux héros sont les messies du bien ou les messies du mal… (surtout avec un Eyvindr qui s’est construit avec les Traquedieux pour modèles, qui vénéré Tyr et Cyanthe toute sa vie pour découvrir qu’il a toujours vécu dans l’ignorance de la vérité, donc dans un déni de réalité)

 

PS: Des fois je tombe sur des avis d’un telle mauvaise fois qu’ils entrent directement au hall of shame de l’hypocrisie la plus crasse… Donc je signale l’avis du dénommé Sam Quixote, autoproclamé spécialiste en comics qui parle de déchet, de plus mauvais comic de tous les temps réunis, et de pire plagiat du Seigneur des Anneaux jamais réalisé depuis l’aube de l’histoire de l’humanité. Mieux vaut en rire qu’en pleurer certes, lui ou un autre comme LoLo – « Dr Comics » du site lescomics.fr, mais ceux qui utilisent le mot « poncif » sans savoir ce qu’il veut dire sont vraiment pénibles à supporter !!!!

note : 8/10

Alfaric

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