Gilles Chaillet
(scénario & dessin)

La Dernière Prophétie, tome 2 :

Les Dames d’Emèse

 

Bande dessinée, histoire / antiquité
Publiée le 22 janvier 2003 chez Glénat

Flavien a accepté de traverser le monde des morts pour découvrir la vérité sur la dernière des Sept Prophéties. Les Sibyllins lui content l’histoire de l’aérolithe sacré nommé le Ba’al d’Emèse. Cette météorite tombée du ciel fut considérée comme un morceau de Soleil et devint l’égal d’un dieu. Il rayonna d’abord sur toute la Syrie, puis bientôt sur le monde. En son nom, des enfants sont enlevés pour être livrés en sacrifice.Dans ce monde trouble et en proie aux tourments, Septime Sévère accède au trône et épouse Julia Domna. La famille envahit alors le Palatin, leur pouvoir s’accroît et les dames d’Emèse enfantent des futurs dirigeant de l’Empire… Jusqu’au jeune Varius Avitus, qui se considère comme le serviteur et l’envoyé du Soleil d’Emèse et qui se rebaptisera lui-même Héliogabale. L’un des plus terribles empereurs qu’ait connu la Rome Antique…

La Loge noire est une collection de bandes dessinées de l’éditeur Glénat à dominante ésotérique dirigée par le désormais bien connu Didier Convard. Mais bon sang ne saurait mentir (ou chassez le naturel, il revient au galop), et Gilles Chaillet pioche dans son amour de toujours pour la Rome antique pour la série intitulée La Dernière Prophétie (c’est assez dingue qu’un tel amoureux de cette période ait consacré l’essentiel de sa carrière à la série médiévale Vasco… Peut-être un complexe d’infériorité vis de son mentor Jacques Martin et de sa série culte Alix ?)

 

Le récit de ce tome 2 ayant pour titre Les Dames d’Emèse est presque entièrement consacré à la suite du voyage spirituel de Flavien en compagnie de la sibylle censée lui dévoiler les Sept Prophéties qui scande l’histoire de l’humanité, mais surtout de la dernière qui doit lui révéler le destin de la Rome éternelle déchirée entre chrétiens et païens. Le récit de la sibylle est prétexte à raconter l’histoire du bétyle d’Emèse, et à travers celle-ci l’histoire de la dynastie sévérienne (il semble qu’il s’agissait d’un projet de longue date de la part de l’auteur, mais ne nous voilons pas la face : c’est quand même une sacrée digression au sein du récit principal…)

Si les empereurs julio-Claudiens et flaviens sont bien connus grâce aux œuvres de Suétone et Tacite, si les empereurs antonins sont connus grâce à un panaché d’ouvrages auquel appartient la correspondance de Pline de Jeune, les empereurs sévériens sont eux longtemps restés hors de portée du grand public. Or on nous offre ici la totale : l’accession à la pourpre impériale de Septime Sévère, son mariage avec l’impérieuse Julia Domna, l’ascension du clan Bassianus et des Dames d’Emèse, le meurtre de Géta par son frère Caracalla, celui de Caracalla par son préfet du prétoire Macrin, celui de Macrin par les partisans de Varius Avitus, adorateurs acharnés du Ba’al d’Emèse… Car pour ses derniers, l’éclipse solaire à laquelle ils ont assisté est le présage que Ba’al va l’emporter sur Jupiter ! On pioche donc à foison dans le séculaire et fabuleux sanctuaire d’Emèse pour acheter les loyautés des uns et des autres…

– Avez-vous remarqué combien les gens détestent ceux dont ils ont si souvent besoin…

Tout cela nous est raconté à travers les yeux du brave Caïus, nouvellement muté en Orient pour diriger le district d’Emèse. Malgré les fausses pistes et la fausse collaboration des autorités locales, ce dernier enquête sur une série d’enlèvements d’enfants par de mystérieux cavaliers parthes… et la mort semble frapper ceux qui voudraient parler ou qui s’approchent trop près de la vérité ! Bon gré mal gré, il devra participer aux games of thrones des ambitieuses Dames d’Emèse… (Le destin de Flavien et Ariane semble ainsi être une répétition de celui de Flavien et d’Hélène.)

Un récit plus historique qu’ésotérique donc, magnifiquement mis en image par le regretté Gilles Chaillet, assisté par son élève Christophe Ansar aux décors, et par son épouse Chantale Defachelle aux couleurs… Ben oui, tous ces panoramiques qui s’étalent sur 2 pages c’est du travail de titans… (Dès le départ une reconstitution à tomber par terre du sanctuaire de Ba’al à Homs en Syrie, et ce n’est que le début du festival !)
Après c’est de la BD franco-belge old school avec toutes ses qualités et ses limitations, sinon ses défauts (genre le charadesign réaliste qui fait davantage la part belle aux tronches à la Goya qu’aux beaux gosses et aux belles gosses). Mais tout ceci n’est pas grand-chose comparé à la majesté des décors en technicolors qui nous emporte dans une reconstruction historique de qualité qui a du demander des recherches pour les monuments et les vêtements dignes d’un moine d’un moine cistercien ! Gilles Chaillet, c’est toutes les petites mains d’un film hollywoodien à lui tout seul, et l’auteur et nous offre un beau voyage dans cette Rome antique qu’il affectionnait tant.

Le tome 3 va-t-il revenir au présent avec l’arrestation du Nicomaque, le père de Flavien, par Sirice, l’évêque de Rome, ou va-t-il continuer sur sa lancée en allant au-delà du coup d’État de Raphanae (18 mai 218) pour nous conter par le menu les frasques du règne d’Héliogabal l’illuminé ?

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note : 7,5/10

Alfaric

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